PV1983-12-29 Lauranne VAQUER



SEANCE DU JEUDI 29 DECEMBRE 1983

Le Conseil se réunit à 9 h 30, tous ses membres étant présents, à l'exception de MM. SEGALAT et GISCARD d'ESTAING qui sont excusés.

Monsieur le Président rappelle que l'ordre du jour porte sur l'examen la loi de finances pour 1984 et sur l'examen de la loi sur le prix de l'eau en 1984.

I . EXAMEN DE LA LOI DE FINANCES POUR 1984 :

Monsieur GROS intervient avant que s'engage l'étude de la loi déférée pour faire état de son étonnement de ne pas avoir pu examiner le projet de décision avant la présente séance. Il rappelle que le Conseil avait décidé que les projets de décisions seraient communiqués à chacun des membres au plus tard la veille de la séance. Il ne comprend pas pourquoi cet engagement n'a pas été respecté pour ce qui est de la loi de finances pour 1984. Toute loi de finances est un acte majeur.
II est donc important que les membres du Conseil puissent réfléchir sur les questions qui y sont soulevées.
Pour sa part, Monsieur GROS se déclare incapable de se prononcer en connaissance de cause sur toutes les difficultés que posent les recours relatifs à la loi de finances pour 1984.

Monsieur JOZEAU-MARIGNE indique qu'eu égard au très court laps de temps dont il a disposé et eu égard aux multiples questions qui se posaient il n'a pas été à même d'élaborer un projet définitif avant le mercredi 28 décembre en fin d'après-midi.

Monsieur le Président demande alors à Monsieur JOZEAU-MARIGNE de présenter son rapport.

Monsieur JOZEAU-MARIGNE rappelle à ses collègues que le Conseil a été saisi les 20, 21 et 22 décembre 1983 de trois recours lui déférant la loi de finances pour 1984. Deux de ces recours ont été formés par des sénateurs et le dernier par des députés.

Il propose à ses collègues d'examiner une à une les questions qui ont soulevées par les saisissants.

A. SUR L'ARTICLE 14-1 RELATIF A LA TAXE FONCIERE SUR LES PROPRIETES BATIES :

Monsieur JOZEAU-MARIGNE : cet article a pour objet de réduire, à compter de 1984, la durée des exonérations de taxes foncières sur les propriétés bâties, prévues à l'article 1385 du Code général des impôts. En effet, jusqu'en 1973, dans un but d'encouragement à la construction, un régime d'exonération de longue durée a été institué en faveur des constructions nouvelles. Les propriétaires étaient exonérés de la taxe foncière pendant une période pouvant aller jusqu'à 25 ans, le manque à gagner pour les collectivités locales étant supporté par le Trésor public. A partir de 1973, ce régime de faveur a été supprimé, mais pour les constructions bâties postérieurement à cette date. Il faut préciser que les constructions neuves à caractère social (prêts P.A.P. ou P.L.A.) bénéficient d'une exonération de 15 ans.

L'objet de l'article 14-1 qui a subi de nombreuses modifications en cours de procédure législative est de ramener à 15 ans, à compter de 1984, la durée des exonérations de taxes dont bénéficient les propriétés bâties, achevées avant le 1er janvier 1973 (article 1385 du Code général des impôts). Echappent à cette règle certaines catégories de logements sociaux à usage locatif.

Pour les députés auteurs de la saisine, cette nouvelle disposition méconnaît le principe de la continuité de l'Etat ainsi que le principe de l'égalité devant la loi.

Ces moyens ne peuvent être retenus : d'une part, aucun principe constitutionnel n'interdit à la loi de remettre en cause une exonération fiscale qui avait été établie par une loi antérieure. D'autre part, on ne peut soutenir qu'il y ait rupture de l'égalité suivant la date d'application d'une loi.

Monsieur JOZEAU-MARIGNE propose donc au Conseil de rejeter les moyens des députés.

Monsieur le Président déclare ouverte la discussion générale.

Monsieur VEDEL constate qu'il est malsain de voir une loi remettre en cause des dispositions qui avaient un caractère quasi-contractuel . Tel est le cas pour l'exonération de la taxe foncière dont devaient bénéficier les acquéreurs de propriétés bâties lors de l'acquisition de ce bien. Cela évoque l'histoire du colonel qui annonce à ses soldats qu'à la fin d'une longue marche ils auront un cigare et une surprise. Arrivés au but, la surprise se révèle être le fait qu'ils n'auront pas de cigare. Ceci dit, le Doyen VEDEL rappelle que seules sont prohibées les dispositions rétroactives en matière pénale. Par ailleurs, rien n'interdit au législateur de revenir sur un avantage qu'il avait octroyé antérieurement.

Maître MARCILHACY considère qu'il ne peut y avoir de droits acquis individuels sur le plan constitutionnel.

Monsieur LECOURT approuve les conclusions du rapporteur. Il regrette cependant que le droit français ignore la notion allemande de "confiance légitime". Cette notion est à même de limiter la remise en cause d'avantages acquis.

Monsieur JOZEAU-MARIGNE rappelle au Conseil que, dans sa décision du 29 décembre 1982 relative à la loi de finances pour 1983, le Conseil n'avait pas censuré un article qui supprimait l'exonération en matière de droits de succession ou de donations dont bénéficiaient certains propriétaires de constructions.

Monsieur le Président constatant qu'aucune autre observation n'est présentée soumet au vote du Conseil le projet de décision relatif à l'article 14-1.

Ce projet est adopté à l'unanimité des membres du Conseil.


B. SUR L'ARTICLE 19-VI-1° RELATIF A L'IMPOT SUR LES GRANDES FORTUNES :

Monsieur JOZEAU-MARIGNE : cet article a pour objet d'exonérer définitivement de l'assiette de l'impôt sur les grandes fortunes les biens professionnels. Pour qu'un bien soit considéré comme outil de travail, s'il s'agit de parts représentatives d'un capital social, le détenteur doit :

1° posséder plus de 25 % du capital de la société dont il s'agit ;

2° exercer une fonction de direction effective dans cette société.

Tel est l'objet de l'article 19-6-1° qui est d'ailleurs d'une lecture difficilement compréhensible pour un profane.

Cet article fait l'objet de deux saisines : l'une des députés, l'autre des sénateurs. Selon eux, ces dispositions méconnaissent le principe d'égalité devant la loi fiscale (article 13 de la Déclaration de 1789). En effet, loin d'assurer une contribution aux charges publiques en fonction des facultés respectives des citoyens, cet article frappe plus lourdement les petits porteurs que les gros porteurs.

Cette objection semble, à première vue, sérieuse. En réalité, il paraît difficile de pouvoir reprocher au Gouvernement d'avoir décidé d'exonérer, à titre définitif, l'outil de travail de l'assiette de l'impôt sur les grandes fortunes.



Sur la définition de l'outil de travail, il n'appartient pas au Conseil constitutionnel de critiquer le choix d'un seuil de 25 % d'un capital social. Il fallait bien que la loi définisse un taux à partir duquel la détention d'un capital serait regardée - à condition que son possesseur exerce des fonctions de direction dans l'affaire - comme un patrimoine de nature professionnelle. A défaut d'une appréciation manifestement erronée de la part du législateur, il n'appartient pas au Conseil constitutionnel de le censurer.

C'est pour ces raisons que Monsieur le rapporteur conclut au rejet des moyens développés par les parties saisissantes.

Monsieur le Président déclare alors ouverte la discussion générale.

Monsieur VEDEL constate que sur ce point les saisines sont percutantes. En effet, il est paradoxal de voir qu'un capitaliste détenant 90 % du capital de sa société sera exonéré, au titre de l'outil de travail, du paiement de l'impôt sur les grandes fortunes, alors qu'un petit porteur d'une entreprise familiale possédant 20 % des parts sera, lui, soumis à cet impôt sur les grandes fortunes. Le projet du rapporteur montre en quoi cette évidence ne peut être retenue. En effet, il est dans la logique même de l'exclusion de l'outil de travail de retenir un seuil.

Monsieur LEGATTE s'interroge sur l'utilité de la référence à " l'appréciation manifestement erronée" qui figure dans la décision.

Monsieur VEDEL : la référence à l'erreur manifeste est une arme que les membres actuels du Conseil laissent à la disposition de leurs successeurs. De même que le Conseil d'Etat lorsqu'il reconnaît un pouvoir discrétionnaire au Gouvernement en marque les limites, le Conseil constitutionnel doit se réserver la possibilité de dire : "Halte !" à d'éventuels débordements législatifs. Aucun juge ne peut renoncer d'avance à exercer son contrôle sur un acte qui serait aberrant. Ainsi, la Déclaration de 1789 dispose que les peines doivent être "strictement et évidemment nécessaires". Il n'appartient pas au Conseil de substituer son appréciation à celle du législateur en matière de droit pénal. Cependant, il ne pourrait admettre par exemple que l'abattage d'une vache soit passible de la peine capitale.

Monsieur le Président constatant qu'aucune autre observation n'est formulée soumet au vote le projet du rapporteur.

Le projet est adopté à l'unanimité des membres du Conseil.

C. SUR L'ARTICLE 42 ET L'ETAT A RELATIFS A LA TAXE INTERIEURE SUR LES PRODUITS PETROLIERS :

Monsieur JOZEAU-MARIGNE : le taux de la taxe intérieure sur les produits pétroliers pour 1983 avait été fixé par la loi de finances pour 1983. En cours d'année, l'ordonnance du 18 mai 1983 a modifié les tarifs de cette taxe pour tenir compte, notamment, des baisses des cours mondiaux du pétrole.

Selon les députés, auteurs d'une des saisines, l'article 42 relatif à l'équilibre des ressources et des charges, qui reprend la modification de la T.I.P.P. instituée par l'ordonnance du 18 mai 1983, serait inconstitutionnel, d'une part, en ce qu'il méconnaît l'avant-dernier alinéa de l'article 2 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 en vertu duquel seules les lois de finances rectificatives peuvent, en cours d'année, modifier les dispositions de la loi de finances et, d'autre part, en ce qu'il validerait implicitement l'ordonnance sus-indiquée qui serait elle-même entachée d'inconstitutionnalité.

Ces moyens ne peuvent être retenus. Dans l'article d'équilibre, il appartient au Gouvernement d'évaluer les recettes en fonction d'une situation qui existe. Le Gouvernement a un devoir de sincérité. Il se devait de tenir compte de la situation financière, compte tenu de l'ordonnance du 18 mai 1983. La prise en considération comptable des conséquences de cette ordonnance ne vaut, ni validation ni ratification de ladite ordonnance.

Monsieur le président constatant qu'aucune intervention n'est formulée sur ce point soumet le projet du rapporteur au vote.

La décision du rapporteur relative à la T.I.P.P. est adoptée à l'unanimité.

D. SUR L'ARTICLE 44 DES ANNEXES AU BUDGET DE L'EDUCATION NATIONALE :

Monsieur JOZEAU-MARIGNE : l'annexe "services votés et mesures nouvelles" du ministère de l'Education Nationale comprend deux chapitres nouveaux, n° 31-60 et 31-62, destinés à rémunérer des enseignants précédemment rémunérés au titre du chapitre 43-01. Ces chapitres sont destinés à payer, dans la limite de 15 000, des professeurs qui exercent actuellement leurs fonctions dans des établissements privés liés par contrats avec l'Etat. Il faut enfin indiquer que ces chapitres ne sont pas dotés. Ils figurent dans l'annexe en question avec la mention : mémoire. Les travaux préparatoires indiquent que ces deux chapitres sont destinés à permettre la titularisation de maîtres de l'enseignement privé.



Pour les sénateurs, l'inscription de ces deux chapitres méconnaît les droits de contrôle budgétaire du Parlement. En effet, pour eux, ces chapitres permettraient la création de postes de fonctionnaires par voie réglementaire ou bien ne sauraient avoir aucun effet avant l'entrée en vigueur d'un autre texte de loi de finances.

Pour les députés, ces deux chapitres ne sauraient valoir création de postes de fonctionnaires ; d'autre part, ces chapitres ne peuvent être dotés par voie réglementaire sans méconnaissance des dispositions de l'ordonnance du 2 janvier 1959.

Quelle appréciation peut-on porter sur ces griefs ?

Aucune disposition de la loi ne porte, en premier lieu, d'indication relative au nombre, à la nature et aux caractéristiques des emplois dont la création serait envisagée par les chapitres 31-60 et 31-62. Ainsi, la simple inscription de ces deux chapitres ne saurait valoir création d'emplois.

Ces deux chapitres, d'autre part, ne peuvent être dotés, ni par virement, ni par transfert, sans méconnaître l'article 14 de l'ordonnance du 2 janvier 1959. Il apparaît donc que ces deux chapitres n'ont, en l'état, aucune portée juridique ou financière. Eu égard au caractère limitatif des dispositions qui doivent figurer dans une loi de finances (article 1er de l'ordonnance du 2 janvier 1959), il convient donc de déclarer que l'inscription de ces deux chapitres n'est pas conforme à la Constitution.

En revanche, la suppression de ces deux chapitres non dotés est sans aucune incidence sur l'article 44 de la loi qui regroupe par titre les mesures nouvelles relatives aux dépenses ordinaires des services civils. A fortiori, cette suppression n'a aucune influence sur l'article d'équilibre.

Monsieur le Président déclare ouverte la discussion générale sur ce point.

Maître MARCILHACY déclare avoir toujours été irrité par l'inscription de chapitres "pour mémoire" dans divers textes budgétaires, notamment dans les budgets départementaux.

Aucune autre observation n'étant présentée, Monsieur le Président soumet le projet de Monsieur JOZEAU-MARIGNE sur cette partie au vote du Conseil.

Le projet est adopté à l'unanimité des membres du Conseil.

E. SUR L'ARTICLE 82 RELATIF A L'IMPOSITION DES BENEFICES AGRICOLES :

Monsieur JOZEAU-MARIGNE : l'article 82 abaisse, pour les exploitants agricoles, les seuils en matière de régime d'imposition afin de faciliter le passage des exploitations agricoles du régime du forfait au régime du bénéfice réel simplifié. Cet abaissement se répercute, en vertu de l'article 151 septies du Code général des impôts sur le régime des plus-values professionnelles. En effet, l'article 151-7° exonère de toutes impositions sur les plus-values les contribuables qui sont placés sous le régime du forfait.



Pour les députés auteurs de la saisine, cet abaissement des seuils fiscaux institue à l'encontre des seuls agriculteurs un régime discriminatoire en ce qui concerne l'imposition des plus-values professionnelles.

Cet argument ne peut être retenu. Le principe d'égalité n'interdit pas à la loi de prendre en compte la nature particulière des activités de diverses catégories de travailleurs indépendants. Les règles fiscales peuvent ainsi varier suivant les catégories professionnelles. L'article 82 qui aménage le régime fiscal des agriculteurs ne saurait être considéré comme instituant des discriminations arbitraires eu égard, comme il vient d'être dit, à la diversité des activités économiques et au fait que tous les agriculteurs contribuables se trouvent soumis aux mêmes règles.

Aucune observation n'étant présentée sur ce point, Monsieur le Président soumet le projet du rapporteur au vote du Conseil. Cette partie du projet est adoptée à l'unanimité.

F. SUR L'ARTICLE 89 RELATIF AUX PERQUISITIONS ET SAISIES OPEREES PAR LES AGENTS VU FISC :

Monsieur JOZEAU-MARIGNE : l'examen de cette question est particulièrement délicat.

L'article 89, ancien article 83, prévoit que des agents du fisc ayant le grade d'inspecteurs spécialement habilités peuvent, assistés d'un officier de police judiciaire, procéder à des perquisitions et des saisies afin de rechercher des infractions en matière d'impôts directs et de taxes sur le chiffre d'affaires. Ces agents doivent y avoir été autorisés par une ordonnance du Président du tribunal de grande instance ou du juge d'instruction qu'il aura délégué pour le suppléer.

Les opérations de perquisitions et saisies ne peuvent être effectuées qu'en la présence de l'occupant des lieux ou, à défaut, du représentant qu'il aura désigné ou, à défaut encore, en présence de deux témoins choisis par l'officier de police judiciaire en dehors des personnes de l'administration sous ses ordres ou sous les ordres de l'inspecteur des impôts. Il est prévu que ces témoins signent le procès-verbal des opérations de saisies. L'article 89 dispose que pour des visites domiciliaires l'inspecteur des impôts doit avoir reçu une autorisation spéciale du juge. Enfin, une fois terminées ces opérations de perquisitions et de saisies, ce sont les dispositions du livre des procédures fiscales qui reprennent leur empire.

Ces dispositions font l'objet de critiques de la part des sénateurs et des députés. Cet article serait contraire aux dispositions de l'article 66 de la Constitution qui confie à l'autorité judiciaire la garde de la liberté individuelle. Pour les requérants, en effet, l'article 89 est trop imprécis en ce qui concerne la nature des infractions poursuivies et les pouvoirs conférés aux agents du fisc.

Ces agents se verraient confié un pouvoir discrétionnaire quant à l'initiative des perquisitions auxquelles ils peuvent procéder en l'absence même du moindre indice ou preuve d'infraction.

Monsieur le rapporteur demande à ses collègues de bien vouloir suivre avec une attention particulière le cheminement de sa pensée. Il indique qu'il ne retiendra pas les arguments des saisissants pour les raisons suivantes :

- en premier lieu, le cadre des poursuites est clairement défini par l'article critiqué. Seules sont visées en effet les poursuites relatives à des infractions en matière d'impôts directs ou de taxes sur le chiffre d'affaires. Les opérations autorisées sont clairement délimitées par les articles 7, 15, 16 et 17 de l'ordonnance n° 45-1484 du 30 juin 1945 relative à la constation, poursuite et répression des infractions à la législation économique. Il faut noter d'ailleurs que les dispositions de cette ordonnance ont été modifiées de telle façon qu'elles assurent mieux les droits de la défense ;

- par ailleurs, le texte prévoit une garantie judiciaire : l'agent du fisc ne peut intervenir que si un juge lui donne une autorisation préalable pour chaque opération. Le choix du juge n'est pas à la discrétion du fisc. Le texte prévoit que le seul magistrat compétent pour donner une autorisation est le Président du tribunal de grande instance ou, à défaut, le juge d'instruction qu'il aura délégué à cet effet. Le recours à un magistrat implique nécessairement que celui-ci, avant de délivrer son ordonnance, devra examiner le dossier que lui présente l'administration fiscale et qu'il ne pourra délivrer d'autorisation que s'il constate que le fisc est en possession d'indices sérieux permettant de suspecter que des infractions en matière d'impôts directs ou de taxes sur le chiffre d'affaires ont été perpétrées. Le texte prévoit en outre, pour les visites domiciliaires, une autorisation spéciale ;

- d'autre part, l'article 89, en ce qui concerne les opérations de perquisitions , prévoit la présence obligatoire d'un officier de police judiciaire. La perquisition ne peut être effectuée qu'en la présence de l'occupant des lieux ou, à défaut, de son représentant ou, encore, de deux témoins indépendants choisis par l'officier de police judiciaire. Il est prévu que ces témoins émargeront le procès-verbal. C'est dire que celui-ci devra être dressé sur le champ. Enfin, une fois terminées ces opérations de perquisitions et de saisies, l'administration fiscale doit recourir aux règles du livre des procédures fiscales pour la poursuite des investigations

Pour Monsieur JOZEAU-MARIGNE, la réunion de ces garanties diverses - et fortement soulignées dans le projet de décision - lui paraît suffisante pour que l'article 89 puisse être déclaré conforme à la Constitution. C'est en ce sens qu'il propose au Conseil un projet de décision.



Monsieur JOZEAU-MARIGNE souligne que l'autorisation délivrée par le juge est une autorisation spéciale et non une autorisation globale. C'est dire que l'administration fiscale devra demander une autorisation judiciaire au "cas par cas". C'est d'ailleurs ce qui avait été indiqué par le Secrétaire d'Etat, Monsieur EMMANUELLI, au député, Monsieur ALPHANDERY, lors de la première lecture à l'Assemblée nationale le 18 novembre 1983 (J.O. pp. 5506 et suivantes). Sachant le peu de valeur qui est souvent attaché aux travaux préparatoires, Monsieur JOZEAU-MARIGNE indique à ses collègues que son projet de décision insiste tout particulièrement sur le caractère "spécial" que doit revêtir toute autorisation du juge, qu'il s'agisse d'une perquisition dans des locaux ordinaires ou dans un domicile privé (page 13, 3ème considérant). Pour le rapporteur, l'interprétation stricte que donne de ce texte le Conseil constitutionnel est de nature à en assurer la constitutionnalité. A ce sujet, Monsieur JOZEAU-MARIGNE rappelle à ses collègue quelle autorité le Conseil constitutionnel attache à ses décisions. Il cite, à ce sujet, la décision n° 62-18 L du 16 janvier 1962 relative à la loi d'orientation agricole. L'interprétation directive que donne le Conseil de l'article critiqué s'impose à tous. Dans cette mesure, l'article 89 peut être déclaré conforme à la Constitution.

Monsieur le Président déclare ouverte la discussion générale.

Monsieur GROS attire solennellement l'attention du Conseil sur la gravité que revêtirait à ses yeux une décision de conformité telle qu'elle est proposée par le rapporteur.

En premier lieu, il est très inquiétant de voir que la décision proposée vise l'ordonnance du 30 juin 1945. N'est-ce pas en reconnaître indirectement la validité. La législation, par renvoi et référence à d'autres textes, est une pratique regrettable. Le Conseil doit défendre les principes et non cautionner des textes dérogatoires. Pour le Président GROS, seule l'autorité judiciaire chargée de la protection de la liberté individuelle peut être habilitée à pénétrer dans un domicile privé. En dehors des flagrants délits, seul un juge d'instruction, au vu d'un dossier étoffé, est compétent pour décider s'il y a lieu ou non de procéder à une perquisition. L'article 89 laisse l'entière initiative des mesures de perquisitions et de saisies au fisc, le juge se bornant à intervenir pour autoriser ces opérations. Toute perquisition est un acte extrêmement grave. Ceux qui en ont été victimes savent qu'une perquisition est comparable à un ouragan ou à un raz de marée. Si on admet que l'autorité judiciaire peut y procéder directement ou sur commission rogatoire, il n'est pas admissible par contre que le fisc dispose d'un tel pouvoir. Monsieur GROS ne mesure pas encore quelles sont les répercussions de la décision proposée par le rapporteur. Il n'a pas eu le temps suffisant pour y réfléchir. Elle suscite chez lui cependant une très grande inquiétude.

En second lieu, la décision proposée par le rapporteur ne peut recueillir l'adhésion de Monsieur GROS car elle est assimilable à une sorte de consultation juridique. Le projet du rapporteur n'admet la constitutionnalité de l'article 89 qu'en sollicitant, de manière excessive, le texte critiqué. Le Conseil constitutionnel doit rester fidèle à sa position traditionnelle. Si un texte est ambigu et imprécis, il doit être censuré surtout quand il risque, comme en l'espèce, de porter atteinte aux libertés individuelles.
Il ne faut pas non plus se faire d'illusions sur la portée de l'autorité des décisions du Conseil. Les ordres de juridictions souverains pourront fort bien interpréter ce texte différemment et, dans ce cas, les citoyens ne disposeront d'aucun recours.
Il appartient au Conseil, non d'interpréter ou de solliciter les text mais de dire s'ils sont ou non conformes à la Constitution. Pour sa part, Monsieur GROS considère que l'article 89 ne peut pas être considéré comme conforme à la Constitution.

Monsieur VEDEL déclare ne pas être éloigné de la position que vient d'illustrer Monsieur GROS. Lorsqu'il était étudiant, il avait occupé un poste de fonctionnaire dans l'administration des impôts et il se souvient que cette administration avait tendance à considérer que tout ce qui était fiscal était sacré. Ce qui choque Monsieur VEDEL est, d'une part, la référence à l'ordonnance du 30 juin 1945 , texte particulier promulgué pendant une période de troubles très graves et, d'autre part, la désinvolture dont manifeste le fisc en ce qui concerne l'inviolabilité du domicile.

Monsieur VEDEL avait considéré que, dans sa décision du 12 juin 1977 sur la fouille des véhicules, le Conseil constitutionnel s'était montré particulièrement rigoriste. Il estime qu'aujourd'hui il est demandé au même Conseil d'entériner des dispositions beaucoup plus attentatoires aux libertés individuelles. A ses yeux, il est inadmissible qu'un fonctionnaire, fût-il-le Vice-président du Conseil d'Etat, se voie confier le pouvoir de perquisitionner dans un domicile privé. Seule l'autorité judiciair< Il manque surement un "e".>  peut être habilitée à exécuter une mesure aussi extrême.

Quels que soient les mérites de la décision proposée par le rapporteur, elle ne parvient pas à cacher la distorsion qui existe entre les habilitations générales en matière de perquisitions dans les locaux ordinaires et l'autorisation spéciale donnée par le juge en ce qui concerne les perquisitions domiciliaires.

Il ne faut pas se méprendre sur la méthode de l'interprétation directive. Celle-ci peut être utilisée dans deux cas :

- en présence de dispositions claires, le Conseil constitutionnel peut déclarer tel ou tel article conforme à la Constitution en le reprenant point par point. C'est une démarche qui a été effectuée par le Conseil lors de l'examen, par exemple, de la loi "sécurité-liberté". En revanche, le texte de l'article 89 est manifestement ambigu. En conséquence, le recours à la méthode de l'interprétation directive ne présente guère de garanties ;




- la méthode de l'interprétation directive peut être utilisée, d'autre part, lorsqu'un texte présente un certain sens qui le rend constitutionnel. Cette méthode est très difficile. C'est ainsi qu'à propos de la décision "sécurité-liberté" certains articles définissaient et réprimaient des délits d'entrave à la circulation des chemins de fer. La saisine critiquait ces articles, dans la mesure où ils étaient de nature à porter atteinte au droit de grève des cheminots. En effet, lorsque ces agents sont en grève, ils entravent bien le fonctionnement des trains qui restent immobilisés à quai. Le Conseil n'a pas retenu cet argument. Il a interprété les textes critiqués en démontrant que, pour être applicables, ils exigeaient une action positive de la part de leurs auteurs et qu'ils ne sauraient donc servir à réprimer des faits passifs de grève (décision n° 80-127 DC, rec. 1981, page 15, articles 16, 17 et 30).

La méthode de l'interprétation a ses limites. Le texte de l'article 89 est atteint de plusieurs vices. Le plus irrémédiable d'entre eux procède de la distinction entre l'autorisation spéciale donnée par le juge en matière de perquisitions domiciliaires et l'autorisation générale donnée par ce magistrat pour toutes les autres perquisitions. Le projet de décision du rapporteur n'a pu occulter ce vice et c'est ainsi que le dernier considérant de la page 13 qualifie l'autorisation des visites extra-domiciliaires de "spéciale", ce qui revient à refaire la loi et non à l'interprèter. Seules, en effet, sont "spéciales" les perquisitions domiciliaires. Ceci ressort clairement de la dernière phrase du premier alinéa de l'article 89.

Ce texte constitue un "bloc enfariné" qui ne "dit rien" au Doyen VEDEL.

Par ailleurs, il faut bien se rendre compte du rapport de force qui existe entre un petit juge à qui on demande une autorisation et la toute puissante direction des impôts. On ne peut se contenter, pour déclarer un texte conforme à la Constitution, d'une simple bénédiction judiciaire.

Le fait que l'administration chercher à redresser des années d'abus en matière de perquisitions n'est pas, en lui-même, suffisant pour admettre la régularité du texte déféré. Pour le Doyen VEDEL, le fisc doit avoir, en ce qui concerne la liberté individuelle, les mêmes obligations que toute autre personne physique ou morale. La circonstance que le fisc dispose du monopole de l'action publique en matière de poursuites fiscales ne constitue en rien une justification des dispositions critiquables que recèle l'article 89.

Monsieur LEGATTE considère que le texte de l'article 89 n'est pas parfait mais il faut se souvenir de son but : il s'agit de lutter contre la fraude fiscale. Monsieur LEGATTE approuve le rapport et le projet de décision de Monsieur JOZEAU-MARIGNE. Si le Conseil censure ce texte, les perquisitions ne pourraient intervenir qu'après de très longs délais. En effet, il faudrait que l'administration fiscale recoure aux voie de droit ordinaire.




Maître MARCILHACY manifeste sa perplexité. A ses yeux, il serait regrettable que le Conseil censure l'article 89. Cela risquerait d'être interprété comme un acte en faveur du laxisme fiscal. Pour lui, l'intervention du juge présente de très sérieuses garanties.

Monsieur LECOURT, après avoir pensé dans un premier temps que l'article 89 pouvait être déclaré conforme, sous réserve d'une interprétation stricte, incline à présent à censurer ce texte qu'il est bien difficile de sauver. En effet, Monsieur LECOURT voit difficilement comment il serait possible de "rattraper" la distorsion entre le caractère spécial de certaines autorisations et le caractère général des autres. Par ailleurs, le fait que l'ordonnance du 30 juin 1945 reçoive aujourd'hui l'approbation du Conseil est de nature à faire craindre que demain ce texte dérogatoire aux droits de la défense reçoive d'autres extensions.

Aujourd'hui, on évoque de moins en moins la notion de liberté individuelle, ce qui en soi est inquiétant. On préfère employer les termes "espaces de liberté". Le texte critiqué restreint manifestement ces espaces. Aucune interprétation directive ne pourra cacher le rôle négligeable laissé à l'autorité judiciaire.

Monsieur JOZEAU-MARIGNE indique à ses collègues que, s'il est exact en principe que seule l'autorité judiciaire peut procéder à des perquisitions et des saisies, il existe néanmoins un certain nombre de textes dérogatoires à cette règle. Il faut ainsi relever l'article L. 42 du livre des procédures fiscales en matière de contributions indirectes, ou l'article 64 du Code des douanes. L'ordonnance du 30 juin 1945 peut être critiquée mais il n'empêche qu'il s'agit d'un texte de droit positif aujourd'hui encore en vigueur.

En matière de perquisitions extra-domiciliaires, les intentions du Gouvernement ne sont pas douteuses. Il n'a jamais été dans l'intention du rédacteur du texte de confier au fisc un pouvoir général de perquisition. Cela ressort de l'échange de vues entre Messieurs EMMANUELLI et ALPHANDERY. Pour sa part, sachant le peu de valeur des travaux préparatoires, le rapporteur a essayé de "rhabiller" le texte critiqué de telle sorte qu'il ressorte clairement de la décision que ces perquisitions extra-domiciliaires ne peuvent intervenir qu'au cas par cas, sur habilitation spéciale du juge.

En ce qui concerne l'autorité des décisions du Conseil, Monsieur JOZEAU-MARIGNE rappelle à ses collègues les termes mêmes de l'article 62, alinéa 2, de la Constitution :
"Les décisions du Conseil constitutionnel ne sont susceptibles d'aucun recours. Elles s'imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles". Monsieur JOZEAU-MARIGNE se déclare prêt à accepter toutes modifications de forme de nature à améliorer le fond de sa décision.


Monsieur GROS, s'il est exact que des autorités administratives peuvent, en vertu de textes particuliers cités par le rapporteur, procéder à des perquisitions, il faut se souvenir que ces textes n'ont pas été soumis au contrôle du Conseil. Celui-ci n'est pas lié par des textes antérieurs à sa création. Il ne peut en tirer des principes s'imposant à lui. Pour sa part, le Président GROS souhaiterait en revenir aux principes de valeur constitütionnelle, notamment à l'article 66 de la Constitution qui confie la garde de la liberté individuelle à l'autorité judiciaire. Il ne voit pas pourquoi on n'appliquerait pas le droit commun en matière de perquisitions à caractère fiscal. Il ne voit pas pour quel motif le fisc échapperait aux règles de droit commun.

Monsieur VEDEL : s'il est exact qu'en matière de contributions indirectes le livre des procédures fiscales confie de vastes pouvoirs au fisc, il ne faut pas oublier qu'il y a une différence notable entre le fait de rechercher le tonneau d'alcool dans une cave et le fait de fouiller dans des papiers privés pour y rechercher des infractions fiscales.

En ce qui concerne l'autorité des décisions du Conseil, il importe d'éviter toute manifestation d'impérialisme. C'est qu'en effet le Conseil constitutionnel se trouve en face de cours suprêmes beaucoup plus anciennes que lui. Il n'est pas évident que chacun des ordres juridictionnels se soumettra aux motifs de sa décision s'il déclarait conforme à la Constitution l'article 89. Il convient, pour s'en persuader, d'évoquer la résistance de la Chambre criminelle vis-à-vis du Tribunal des conflits à propos de l'interprétation des actes administratifs servant de base à des poursuites pénales.

Pour sa part, Monsieur le Doyen VEDEL a rédigé un projet d'annulation de l'article 89 qu'il propose de lire à ses collègues.

Monsieur le Président autorise Monsieur VEDEL à donner connaissance au Conseil constitutinnel Il manque un "o". de son contre-projet.

Monsieur JOZEAU-MARIGNE considère que son projet n'ajoute pas à la loi mais qu'il est, au contraire, fidèle à la fois à la pensée du Gouvernement et aux intentions du législateur.

Il se déclare par ailleurs beaucoup moins inquiet que Monsieur VEDEL en ce qui concerne la réaction de la Cour de cassation.

Monsieur le Président constate le désaccord qui semble partager le Conseil. Il ne souhaite pas, pour sa part, être obligé, pour le départager, de faire emploi de la voix prépondérante dont il dispose.

Il indique qu'il a été frappé par le fait qu'en première lecture Monsieur ALPHANDERY semblait acquiesser aux explications fournies par le Secrétaire d'Etat au Budget en ce qui concerne le caractère spécial des autorisations de perquisitions extra-domiciliaires. D'autre part, il ne faut pas oublier les termes mêmes de l'article 62, alinéa 2, dont le Président donne de nouveau lecture aux membres du Conseil.




Monsieur le Président suggère alors au Conseil de suspendre ses travaux et propose que se réunisse un comité restreint autour du rapporteur afin de tenter de dégager une rédaction qui puisse réunir l'accord du plus grand nombre possible des membres du Conseil.

Monsieur le Président demande à chacun des membres du Conseil s'il approuve la méthode qu'il vient de suggérer. La proposition du Président est unanimement approuvée.

Le Président suspend donc la séance à 12 h 35.

-oOo-

La séance est reprise à 14 h 40.

Monsieur le Président estime que le choix qui s'offre au Conseil est soit l'interprétation d'un mauvais texte soit son rejet pur et simple. Au cours de la réunion de travail qui s'est déroulée pendant la suspension de séance, un accord semble s'être dégagé sur un projet de rédaction élaboré par Monsieur VEDEL. Pour sa part, Monsieur le Président se féliciterait si un projet pouvait recueillir l'assentiment de tous les membres du Conseil.

Monsieur VEDEL considère que ce qui a pu séparer les membres du Conseil à propos de l'article 89 n'est pas une question de principe mais de méthode. Pour sa part, il a été très sensible à l'objection selon laquelle une décision d'inconstitutionnalité risquerait d'être interprétée comme favorable au laxisme fiscal. C'est pour ces raisons qu'il propose un considérant qui marque nettement la réprobation du Conseil envers la fraude fiscale.

Monsieur VEDEL lit alors son projet de décision (pages 13 et 14 du projet définitif).

A ses yeux, il ne s'agit pas d'une décision de censure mais d'une critique du caractère imprécis du texte adopté par le Parlement.

Monsieur LEGATTE déclare approuver les deux premiers considérants du projet de Monsieur VEDEL. En revanche, il ne peut souscrire à ses conclusions. L'article 89 concilie au mieux les droits individuels et les exigences de la lutte contre la fraude fiscale. Le projet proposé par Monsieur VEDEL risque d'apparaître comme favorable à la fraude.

Maître MARCILHACY déclare partager le point de vue de Monsieur LEGATTE.

Monsieur JOZEAU-MARIGNE fait part de son accord sur le fond avec ce qui vient d'être lu par le Doyen VEDEL. Deux voies s'offrent au Conseil. Soit il interprète le texte de l'article 89 afin de le déclarer conforme, soit il le rejette. Pour sa part, Monsieur JOZEAU-MARIGNE se demande si le considérant central de la page 14 qui formule les quatre reproches à l'égard de l'article 89 n'est pas excessivement explicite. Si le Gouvernement dépose un nouveau projet et si le Parlement l'adopte, le Conseil constitutionne <Il manque un "l". > ne risque-t-il pas de se trouver enfermé par le contenu de ce considérant si le nouveau texte lui est déféré.



Monsieur VEDEL : lorsque le Conseil constitutionnel déclare qu'un texte est inconstitutionnel, il lui appartient d'expliquer ses raisons. Censurer un texte sans s'expliquer constituerait un démarche qu'on pourrait qualifier "d'impressionnisme juridique".

Il importe à ses yeux que le Conseil expose clairement les quatre points qui motivent la déclaration d'inconstitutionnalité. Il s'agit :

- de l'acception imprécise du terme "infraction" ;

- du rôle imprécis attribué au juge ;

- de l'absence d'indications sur le contrôle du juge quant au déroulement des opérations de perquisitions autorisées ;

- de la différence de régime entre les perquisitions extra-domiciliaires qui peuvent donner lieu à des autorisations générales et les perquisitions domiciliaires qui doivent être spécialement autorisées.

Il considère que son projet constitue un acte de sincérité envers le législateur. Le silence du Conseil reviendrait à inviter le Gouvernement et le législateur à "jouer aux devinettes".

Aucune autre observation n'étant formulée au sujet de l'article 89, Monsieur VEDEL se retire pour faire frapper son projet de décision. Il demande à Monsieur le Président et à ses collègues de bien vouloir continuer l'examen des autres dispositions pendant son absence (voir "F" suite, page 19 du présent procès-verbal).

G. SUR L'ARTICLE 90 RELATIF AUX REGLEMENTS PAR CHEQUES DE BIENS ET DE SERVICES :

Monsieur JOZEAU-MARIGNE : cet article pose le principe du paiement par les particuliers non-commerçants de leurs achats dépassant 10 000 Frs au moyen, soit d'un chèque barré et non transmissible par voie d'endossement, soit par virement bancaire ou postal, soit par carte de crédit ou de paiement. Les non-commerçants n'ayant pas leur domicile fiscal en France peuvent continuer à effectuer leurs paiements comme bon leur semblera.

Pour les sénateurs, cet article est discriminatoire en ce qu'il oppose les personnes ayant leur domicile fiscal en France à celle qui ont leur domicile fiscal à l'étranger. Le rapporteur propose de rejeter cet argument. A ses yeux, il n'est pas arbitraire en matière de fraude fiscale d'opèrer une distinction entre les citoyens, suivant qu'ils ont leur domicile fiscal en France ou à l'étranger. La législation fiscale, en effet, pose les règles spécifiques en ce qui concerne les non-résidents. Ainsi, le Code général des impôts prévoit-il que ces non-résidents, en matière d'impôts sur le revenu, sont soumis à un prélèvement forfaitaire à la source (article 182-A). Pour l'impôt sur les grandes fortunes, seule est prise en compte la valeur de leurs biens situés en France (articles 885-A-2 ) .



Monsieur le Président constatant qu'aucune autre observation n'est formulée, soumet au vote du Conseil le projet du rapporteur sur l'article 90.

Ce projet est adopté à l’unanimité.

H. SUR L’ARTICLE 93-111 RELATIF AU SECRET FISCAL :

Monsieur JOZEAU-MARIGNE : cet article permet aux créanciers d'aliments dont la créance est reconnue par décision de justice de consulter la liste des assujettis aux impôts dressée par la direction départementale des services fiscaux dont dépend leurs débiteur et ceci même si eux-mêmes ne relèvent pas de cette direction. Le droit commun de l'article L. 111 du livre des procédures fiscales autorise la seule consultation de la liste des assujettis de la direction départementale où demeure la personne qui souhaite consulter cette liste.

Selon les sénateurs, ces dispositions méconnaîtraient le droit à la liberté individuelle, en exonérant du secret fiscal les créanciers d'aliments. Ce moyen n'est pas fondé. D'une part, on ne voit pas en quoi le secret fiscal aurait valeur constitutionnelle. D'autre part, les créanciers alimentaires visés par l'article 93-III restent intégralement soumis aux règles interdisant la diffusion de tout renseignement fiscal, posées par l'article L. 111 du livre des procédures fiscales.

Monsieur LECOURT souhaite que soit supprimé le membre de phrase suivant (3ème considérant) : "il n'existe aucun principe constitutionnel relatif au secret fiscal".

Sous réserve de cette modification approuvée par le Conseil, le projet du rapporteur est adopté à l'unanimité des membres du Conseil.

I . SUR L'ARTICLE 108 RELATIF A LA MODIFICATION D’UNE TAXE INSTITUEE PAR LA LOI DE FINANCES POUR 1983 :

Monsieur JOZEAU-MARIGNE : cet article opère, à l'article 14 de la loi de finances pour 1983, une modification orthographique confère un caractère rétroactif à cette modification. Cela modifie les modalités de l'assiette de la taxe sur la provision des entreprises d'assurance.

Selon les députés auteurs de la saisine, cet article, en rendant applicable au 1er janvier 1983 la modification opérée à une disposition contenue dans la loi de finances pour 1983, méconnaît l'article 2 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 aux termes duquel "seules les lois de finances, dites rectificatives, peuvent, en cours d'année, modifier les dispositions de la loi de finances de l'année".


Ce moyen ne peut être retenu. Si l'article 1er de l'ordonnance du 2 janvier 1959 réserve exclusivement aux lois de finances certaines dispositions qu'elles énumèrent, il ne faut pas oublier que l'article 34 de la Constitution donne compétence à la loi pour fixer les règles concernant l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures. La loi de finances peut contenir des dispositios à caractère fiscal et on ne saurait, dès lors, interdire à un texte législatif de modifier des dispositions fiscales. C'est dire, en conséquence, que rien n'interdit à la présente loi de finances de modifier les éléments de calcul de la taxe dont il s'agit, ces dispositions ne figurant pas, d'ailleurs, au nombre de celles qui, par leur nature, ne peuvent que figurer dans des lois dites de finances.

Monsieur le Président constatant qu'aucune observation n'est formulée sur ce point soumet au vote le projet du rapporteur sur l'article 108.

Cette partie du projet est adoptée à l'unanimité des membres du Conseil.


J. SUR L'ARTICLE 114 RELATIF A LA PUBLICITE DE L'IMPOT :

Monsieur JOZEAU-MARIGNE : cet article modifie l'article L. 111 du livre des procédures fiscales relatif à la publicité de l'impôt. Désormais :

- la liste des redevables sera établie par commune et non plus dressée au niveau départemental ;

- cette liste comprendra, outre le nom des personnes ayant leur domicile dans la commune, celui de celles qui n'y ont que leur simple résidence ;

- en ce qui concerne l'impôt sur le revenu, figureront sur cette liste, outre le montant de l'impôt et le nombre des parts, le montant du revenu imposable et le montant de l'avoir fiscal ;

- enfin, en matière d'impôt sur les grandes fortunes, figurera sur cette liste, outre le nom des redevables, la valeur de leur patrimoine et le montant de l'impôt mis à leur charge.

Selon les députés, cet article, issu d'un amendement parlementaire, a été adopté en méconnaissance des règles de recevabilité des articles 40 de la Constitution et 42 de l'ordonnance du 2 janvier 1959. Il méconnaît, par ailleurs, l'article 2 de la Déclaration de 1789 en ce qu'il porte atteinte au respect de la vie privée et à la sûreté des citoyens. Enfin, il s'agirait d'un cavalier budgétaire, au sens de l'article 1er de l'ordonnance du 2 janvier 1959.



Le rapporteur propose de rejeter ces moyens.

A défaut d'avoir invoqué l'irrecevabilité lors de l'examen de l'amendement, cette irrecevabilité ne peut plus être soulevée devant le Conseil constitutionnel.

On ne voit pas en quoi cette disposition porte atteinte à l'article 2 de la Déclaration de 1789. Enfin, cette disposition, de nature à améliorer la sincérité des déclarations fiscales, trouve sa place dans une loi de finances.

Sur ce dernier point, Monsieur JOZEAU-MARIGNE indique qu'en tant que parlementaire il n'aurait jamais voté un tel article. Il pense in peto qu'il s'agit d'ailleurs d'un cavalier. Cependant, il considère qu'il ne serait pas opportun que le Conseil censure une nouvelle disposition destinée à améliorer la transparence fiscale et, par là, à lutter contre la fraude.

Monsieur le Président déclare ouverte la discussion générale.

Monsieur GROS rappelle que, traditionnellement, le Conseil constitutionnel s'efforce de rétablir la régularité du contenu des lois de finances en les épurant des cavaliers budgétaires qui n'y ont pas leur place. Désormais, en effet, les lois de finances ne sont plus des "fourre-tout" comme cela était le cas au début de la IVème République. A ce sujet, Monsieur GROS rend hommage à Monsieur SEGALAT qu'il qualifie de "jouteur" contre les cavaliers. En ce qui concerne l'article 114, il s'agit manifestement d'un cavalier puisque ces dispositions ne touchent en rien aux ressources et aux charges de l'Etat, compte tenu d'un équilibre économique et financier. Cette disposition ne concerne pas non plus l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions. Sur le fond, ces dispositions sont, en outre, inopportunes en ce qu'elles risquent d'ouvrir la guerre dans les communes, chacun épiant son voisin ou l'épicier du coin.

Monsieur JOZEAU-MARIGNE est très sensible à ce que vient de déclarer Monsieur GROS. Il y a tout lieu de croire que cette disposition n'a pas sa place dans une loi de finances. Elle ne figure en effet, ni parmi les mesures qui doivent y figurer, ni parmi les mesures qui peuvent y figurer. Ceci dit, Monsieur JOZEAU-MARIGNE s'en remet au Conseil sur l'opportunité d'une censure de l'article 114.

Aucune autre observation n'étant présentée, Monsieur le Président soumet le projet de décision du rapporteur au vote du Conseil.

Ce projet est adopté par tous les membres du Conseil, à l'exception de Monsieur GROS qui vote contre.



F. SUR L'ARTICLE 89 (SUITE) RELATIF AUX PERQUISITIONS VU FISC (Voir, supra, page 15) :

Monsieur le Président demande à Monsieur VEDEL de bien vouloir donner lecture de son projet de décision relatif à l'article 89, tel qu'il vient d'être diffusé à chacun des membres du Conseil.

Aucune observation n'étant formulée, Monsieur le Président soumet cette partie de la décision au vote du Conseil, après avoir remercié Messieurs JOZEAU-MARIGNE et VEDEL pour leurs efforts respectifs .

Le projet de décision rédigé par Monsieur VEDEL est adopté par tous les membres du Conseil, à l'exception de Messieurs MARCILHACY et LEGATTE qui votent contre.

(Le projet de décision original du rapporteur, relatif à l'article 89 est joint au présent procès-verbal).

Monsieur le Président passe ensuite la parole à Monsieur LEGATTE, rapporteur dans l'affaire relative au prix de l'eau pour 1984.

Monsieur LEGATTE remercie et annonce tout de suite que la question de l'eau ne sera peut-être pas aussi limpide qu'il n'y paraît.

Le Conseil constitutionnel a été saisi par plus de soixante sénateurs et plus de soixante députés, en application de l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, de la loi sur le prix de l'eau en 1984, adoptée définitivement par le Parlement le 21 décembre 1983 < Le dernier chiffre de l'année n'est pas très lisible. >

Pour examiner le texte déféré au Conseil constitutionnel, je poserai trois questions :

- I. Pourquoi, juridiquement, faut-il une loi sur le prix de l'eau ?

- II. Quelles sont les critiques adressées à cette loi ?

- III. Quelle est la pertinence de ces critiques ?

-oOo-

I. POURQUOI, JURIDIQUEMENT, FAUT-IL UNE LOI SUR LE PRIX DE L'EAU ?

A) La gestion de l'eau

1° La distribution d’eau potable est un service public confié au < Il manque un "x". > communes ou à des établissements publics intercommunaux. Ce service est assuré, soit directement par la collectivité publique ou l’établissement public, soit par une personne privée liée par un contrat.

Les règles de fixation du prix de l'eau dépendent des modalités retenues pour la gestion du service :

- Pour les exploitations directes ce sont les délibérations du Conseil municipal qui fixent le prix de l'eau, ces délibérations n'étant plus soumises, depuis la loi du 30 décembre 1970 relative aux libertés communales, à l'approbation de l'autorité de tutelle sous réserve que le budget soit en équilibre ;

- Pour les concessions et les affermages, le Conseil d'Etat, dans un avis du 4 février 1971 concernant l'interprétation de la loi de 1970, a précisé que les communes restaient liées par les obligations qu'elles avaient légalement contractées. Généralement, les contrats prévoient un prix de base auquel s'applique, à des intervalles fixés par le contrat, un coefficient correctif calculé selon des formules de variation définies par le cahier des charges.



2° La facture d'eau comporte plusieurs éléments parmi lesquels il faut distinguer :

- Le prix de l'eau proprement dit, ou prix de base qui correspond au volume de l'eau consommé par l'usager ;

- Différentes redevances comme la redevance d'assainissement, la redevance de pollution perçue pour le compte des agences financières de bassin, la redevance de prélèvement, la redevance perçue au profit du fonds national pour le développement des aductions d’eau ;

- Une surtaxe communale ou syndicale, lorsque le mode de gestion de l’eau, est l’affermage. Cette surtaxe est acquittée par les usagers, perçue par l'exploitant fermier pour le compte de la collectivité qui a affermé les services de distribution d'eau (lorsque le service de distribution est exploité par une concession, il n’existe pas de surtaxe).

La gestion des services de l'eau et la détermination des éléments composant la facture d'eau font appel, on le voit, à des mécanismes divers, complexes et parfois, il faut l'avouer, difficilement compréhensibles par l'usager.

B) La compétence du législateur :

Le Principe de cette compétence :

< C'est le même niveau de titre pour les A, B, ... et les 1, 2, ... >

II est admis que les questions relatives au prix relèvent de la responsabilité de l'Etat et que tous les agents économiques quels qu'ils soient, y compris les collectivités locales, les sociétés concessionnaires ou les sociétés fermières, peuvent être soumis à des règles émanant de l'Etat.

Pour une grande partie des biens et des services, ces règles sont prises dans le cadre des ordonnanes n° 45-1483 et 45-1484 du 30 juin 1945 qui donnent compétence au pouvoir exécutif.

Jusqu'à la loi du 31 décembre 1970 relative à la gestion municipale et aux libertés communales, le prix de l'eau entrait dans le champ d'application de ces ordonnances.

A partir de cette loi, il a été considéré que le contrôle du prix de l'eau, dans les périodes où il se révèle nécessaire, est du domaine de la loi. Pourquoi ? Parce que l'article 4 de la loi supprimait l'approbation de l'autorité de tutelle sur les délibérations par lesquelles les Conseils municipaux fixaient le prix de cession de l'eau potable distribuée par les services communaux ou dont la distribution est concédée par la commune. Dans un avis du 4 février 1971, le Conseil d'Etat a déduit de cet article que désormais les tarifs des services de distribution d'eau et d'assainissement n'entraient plus dans le champ d'application des ordonnances de 1945. C'est ainsi, qu'une loi est donc nécessaire pour poser le principe d'un encadrement des évolutions du prix de l'eau. Et depuis 1970 les exemples n'ont pas manqué.



Les précédents legislatifs :

Les lois tendant à maîtriser le prix de l'eau ne sont pas rares :

- En 1976, la loi de finances rectificative du 29 octobre dans son article 9 édictait une mesure de blocage pour le dernier trimestre de 1976 au niveau atteint au 15 septembre 1976 ; d'autre part, cette loi définissait pour toute l'année 1977 une norme maximale d'évolution du prix de l'eau fixé à 6,5 % par rapport au tarif pratiqué le 15 septembre 1976 ;

- En 1977, La < La majuscule n'est pas nécessaire. >loi du 29 décembre dans son article 12 limitait l'effet des clauses d'indexation à 78 % de l'augmentation résultant normalement de l’application des contrats pour l'exercice 1978 et d'autre part, plafonnait, pour le premier semestre 1978, les hausses à 6 % par rapport au prix appliqué au 31 décembre 1977 ;

- En 1978, la loi du 29 décembre prévoyait que l'augmentation du prix de l'eau pour l'année 1979 serait calculée par référence aux conditions économiques prises en compte à la date de la dernière variation de prix autorisée par les contrats relatifs à l'exploitation du service public de distribution d'eau ;

- Enfin, en 1982, on se souvient que la loi du 30 juillet sur les prix et revenus avait prévu un blocage des prix figurant sur les factures d'eau et d'assainissement. Ce blocage était normalement applicable jusqu'au 31 décembre 1983. Cependant, la loi prévoyait la possibilité d'y mettre fin par décret à compter du 1er novembre 1982 "au vu notamment des accords de régulation qui auraient pu être conclus avec les professionnels".

La sortie du blocage est intervenue pour les collectivités locales et pour les sociétés distributrices d'eau par deux décrets du 29 octobre 1982 approuvant les accords signés entre le Gouvernement et les professionnels intéressés :

- Le premier accord cadre conclu entre le Gouvernement et l'association des maires de France pour les services relevant directement des collectivités locales, provoyait un abattement de 4 points sur le pourcentage prévu pour 1982 par rapport à 1981, ainsi que la limitation à 7 % par rapport au tarif de 1982 et à 16 % par rapport au tarif de 1981 de l'augmentation des tarifs pour 1983 ;

- Un accord de régulation signé avec le syndicat professionnel des distributeurs d'eau prévoyait un rabais de 4 % sur les prix contractuels des services concédés ou exploités en régie.

Si le premier accord est applicable jusqu'au 31 décembre 1983, il n'est pas prévu de terme à l'application de l'accord signé par le syndicat professionnel des distributeurs d'eau.


Ce bref rappel du dispositif de 1982 m'a paru important dans la mesure où, globalement, la loi de 1984 soumise à l'examen du Conseit < Faute de frappe, le "t" de la fin du mot "conseil" remplace le "l". > peut s’analyser comme la reconduction du régime juridique mis en place à l'issue du blocage appliquée en 1982.

C. La loi relative au prix de l'eau en 1984 :

Cette loi comporte deux articles.

. L'article 1er est relatif aux conditions d'évolution des tarifs des services de distribution d'eau et d'assainissement en 1984.

Malgré une rédaction pour le moins confuse, le dispositif mis en place par cet article est le suivant.

1° L'article 1er pose le principe d'un encadrement en 1984 de l'évolution des éléments suivants :

- Le prix hors taxes de l'eau potable distribuée ;

- Les redevances visées -et cette précision est très importante, on y reviendra plus loin- au seul paragraphe III de l'article 75 de la loi de finances pour 1966 ;

- Les surtaxes perçues au profit des communes ou des syndicats de communes ayant affermé leur service.

2° La base de référence du dispositif est le montant légalement établi pour chacun de ces éléments, soit au 31 décembre 1983, soit dans les cas de facturation non continue à la date antérieure la plus récente.

3° Les conditions d'évolution des éléments précités seront fixés par des accords conclus "notamment avec les professionnels" c'est-à-dire en fait, soit avec les collectivités locales, soit avec les sociétés d'exploitation des réseaux d'eau. A défaut d'accord, et à défaut d'accord seulement, ces conditions d'évolution pourront être fixées par décret.

La loi relative au prix de l'eau en 1984 institue un mécanisme de même nature que celui défini à l'article 1er de la loi du 30 juillet 1982 relative aux prix et aux revenus. Celle-ci avait procédé à un blocage du prix de l'eau et de l'assainissement et avait renvoyé à des accords et à des décrets, le soin de d’y mettre fin ; de même, la loi de 1984 bloque les prix de l'eau et de l'assainissement à leur niveau atteint le 31 décembre 1983 et il ne peut y avoir modification des prix que par accords ou, à défaut par décrets.

Par rapport au mécanisme de 1982, la loi apporte une précision en indiquant que les accords ou, le cas échéant, les décrets pourront prévoir des aménagements pour tenir compte, soit des charges résultant des investissements, soit de la création de services, soit des travaux réalisés pour des motifs de sécurité ou de salubrité publique.


. L'article 2 renvoie pour la constatation, la poursuite et la répression des infractions à l'article 1er, à l'ordonnance n° 45-1484 du 30 juin 1945 < Il manque un point. >

Quelles sont les critiques formulées par les députés et les sénateurs auteurs de la saisine à l'égard de cette loi ?

II. QUELLES SONT LES CRITIQUES ADRESSEES A LA LOI ?

Selon les parlementaires auteurs de la saisine, la loi portera atteinte aux principes constitutionnels d'autonomie et de libre administration des communes d'une part, et d'autre part, méconnaîtrait l'étendue des compétences du Parlement, telles qu'elles sont définies à l’article 34 de la Constitution.

A) La violation du principe constitutionnel de libre administration des communes :

Pour les sénateurs auteurs de la saisine, le dispositif juridique envisagé par la loi pour fixer le prix de l'eau est contraire à la loi du 2 mars 1982 en tant, notamment, qu'il réintroduit la tutelle de l'Etat. Leur affirmation repose sur le raisonnement suivant :

. Selon les articles 8 et suivants de la loi du 2 mars 1982, le budget des communes doit être voté et exécuté en équilibre ;

. Or, la loi sur le prix de l'eau, en enlevant aux instances locales le soin de fixer le prix de l'eau, va avoir pour effet de déséquilibrer le budget des communes ;

. En application de la loi du 2 mars 1982, le commissaire de la République devra donc saisir la Chambre Régionale des Compte qui imposera, par voie d'injonction, le rétablissement de l'équilibre des budget communaux ; ainsi sera réintroduite la tutelle de l'Etat.

Pour les sénateurs, le principe de la libre administration des collectivités territoriales prévue aux articles 72 et 34 de la Constitution implique que seule une loi puisse leur imposer des sujétions nouvelles ; or, l'article 1er de la loi votée par le Parlement, en renvoyant à des accords ou à des décrets, la fixatio < Il manque un "n". > du prix de l'eau, met en cause la libre administration des collectivités locales et porte donc atteinte aux articles 72 et 34 de la Constitution.

B) La violation de l'article 34 de la Constitution :

Pour lés députés auteurs de la saisine, les dispositions de l'article 1er de la loi en prévoyant que le prix de l'eau, les redevances et les surtaxes communales et syndicales afférentes peuvent être déterminées par des accords conclus avec les professionnels ou, à défaut, par décret, violent l'article 34 de la Constitution.

Les députés auteurs de la saisine tiennent le raisonnement suivant < Il manque peut-être un double-point. >

. La redevance d'assainissement et les surtaxes communales et syndicales afférentes à la redevance se sont vues reconnaître l < Il mnaque un "e". > caractère de taxe fiscale par la décision du Conseil constitutionnel n° 82-143 DC du 30 juillet 1982.


. Or selon l’article 34 de la Constitution "la loi fixe les règles concernant....l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toute nature" ;

. Donc, la loi de 1984 viole l'article 34 en donnant au Gouvernement le pouvoir de déterminer le taux d'une taxe fiscale.

A l'appui de leur argumentation, les députés auteurs de la saisine invoquent la décision du Conseil constitutionnel du 30 juillet 1982 relative à la loi sur les prix et les revenus dans la mesure où le Conseil constitutionnel a considéré qu'il n'y avait pas, en l'espèce, violation de l'article 34, parce que c'était la loi elle-même qui, en son article premier, limitait directement le taux de la taxe d'assainissement.

III. QUELLE EST LA PERTINENCE DE CES CRITIQUES ?

A) La pertinence de la critique des sénateurs

Deux arguments permettent de repousser les critiques formulées par les sénateurs.

1° Le fait que la loi puisse modifier les conditions de l'équilibre du budget des serives de l'eau et d'assainissement est sans incidence sur sa conformité à la Constitution.

a) Le principe de l'autonomie des collectivités locales ne fait pas, en effet, obstacle à ce que le prix des services publics qui en relèvent soit inclus dans un dispositif général de maitrise de l'inflation.

Par ailleurs, l'encadrement des prix de vente de l'eau n'aura pas nécessairement de conséquences néfastes sur l'équilibre financier des services, dans la mesure où, d'une part, les gestionnaires ont la possibilité d'agir sur les coûts notamment par une meilleure maîtrise des dépenses ou, la réalisation de gains de productivité et où, d'autre part, la loi introduit elle-même des possibilités d’aménagements pour tenir compte des charges supplémentaires liées à la création de services et d'installations ainsi que des considérations de sécurité et de salubrité publique.

b) Je vous rapppelle que dans sa décision n° 82-143 DC du 30 juillet 1982, le Conseil avait considéré qu'en admettant même que le blocage des prix soit de nature à compromettre l'équilibre financier de certains services communaux, cette circonstance serait sans incidence sur la conformité de la loi de 1982 à la Constitution.


2° Conformément à la Constitution, c'est la loi elle-même et non un décret qui impose une sujétion aux collectivités locales en décidant le blocage des prix à leur niveau atteint le 31 décembre 1983.

En effet, en indiquant que "les prix ne peuvent être supérieurs aux niveaux pratiqués au 31 décembre 1983, ou, à défaut, à la date antérieure la plus proche... que dans les limites prévues par des accords conclus notamment avec les professionnels ou, à défaut d’accords, par décret", la loi établit à la fois un blocage des prix de l’eau pour 1984 et les conditions de sortie du blocage décidé par ladite loi.

Comme dans le mécanisme institué en 1982, la sortie du blocage se fera par accords contractuels avec les professionnels, ou, à titre subsidiaire, par décret si aucun accord ne peut intervenir. L’exercice du pouvoir réglementaire est enserré dans des limites de temps -l’année 1984- et de procédure. D’autre part, la loi précise que ces décrets ne peuvent fixer que des normes d'évolution et précise également les motifs possibles de dérogation, à savoir la création de services et d'installation ou des travaux réalisés pour des raisons de sécurité et de salubrité publique.

On retrouve donc dans cette loi, les conditions de sortie du blocage analogues à celles établies par la loi du 30 juillet 1982 et qui avait été reconnue conforme à la Constitution par la décision n° 82-143 DC du 30 juillet 1982.

Dès lors, il est permis de considérer que le législateur ne s'est pas dessaisi de la compétence que lui confère l'article 34 de la Constitution et qui, en matière de libre administration des coIlectivités locales, ne porte que sur les principes fondamentaux.

B) La pertinence de la critique des députés

Toute l'argumentation des députés reposant sur le caractère de la redevance dûe < Il y a une faute, il n'y a pas d'accent circonflexe sur le "u". >par les usagers, et des surtaxes communales ou syndicales, qualifiées par eux de taxes fiscales, il convient donc d'examiner la nature juridique de ces deux éléments.

La nature juridique des redevances visées à l'article 75-III de la loi du 29 novembre 1965 porant loi de finances pour 1966.

Pour bien comprendre de quoi il s'agit, je me propose de vous lire dans son entier l'article 75 de la loi ;

"I. Les réseaux d'assainissement et les installations d'épuration publics sont financièrement gérés comme des services à caractère industriel et commercial.

III. L'article L. 35-5 du code de la santé publique est abrogé et remplacé par les dispositions suivantes :


- Art. L.35-5 : Tant que le propriétaire ne s’est pas conformé aux obligations prévues aux articles qui précèdent il est astreint au paiement d'une somme au moins équivalente à la redevance qu'il aurait payée si son immeuble avait été raccordé au réseau et qui pourra être majorée dans une proportion fixée par le conseil municipal dans la limite de 100 p. 100.

III. Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions dans lesquelles sont instituées, recouvrées et affectées les redevances dues par les usagers ainsi que les sommes visées au paragraphe II ci-dessus".

De cet article il ressort que la loi de 1965 a entendu distinguer deux éléments :

- Les redevances dûes < Il ne devriait pas avoir d'accent circonflexe sur le "u". > par les usagers ;

- Les sommes visées au paragraphe II, c'est-à-dire, exigées des propriétaires qui ne se sont pas conformés à l'obligation de raccordement.

Les redevances dûes < L'accent ciconflexe sur le "u" est une faute. > par les usagers visées à l'article 75-III, précisé par le décret n° 67-945 du 24 octobre 1967 :

. sont la contrepartie d'un service nettement individualisé (collecte et traitement des eaux usées) ;

. sont, pour leur assiette, directement liées au volume d'eau prélevé par l'usager du service ;

. sont exclusivement affectées aux charges de fonctionnement et d'investissement du service de distribution d'eau.

Ces trois critères permettent de considérer que les redevances de l'article 75-III ont le caractère de rémunération pour service rendu et non de taxes fiscales.

Sans doute le Conseil d'Etat, dans un arrêt du 21 novembre 1975, Société La Grande Brasserie Moderne, a considéré que les redevances d'assainissement avaient le caractère de taxes fiscales. Mais, le Conseil d'Etat, ne visait expressément que l'article 75, paragraphe II de la loi de finances pour 1966. ET, effectivement, on peut admettre que la redevance de l'article 75-11 qui frappe les propriétaires qui ne se sont pas conformés à l'obligation de raccordement, ne constitue pas le prix du service rendu.

Et, c’est précisément pour se conformer à l'article 34 de la Constitution que le législateur de 1984 a entendu laisser en dehors du champ d'application de la loi, les sommes dûes < Pas d'accent circonflexe sur le "u". > par les personnes qui ne se sont pas conformées aux obligations de raccordement et n'inclure dans le champ d'application de la loi relative aux prix de l'eau que les redevances dûes < Pas d'accent circonflexe sur le "u". > par les usagers visés à l'article 75-III.



Sans doute pourrait-on encore objecter que le Conseil constitutionnel dans sa décision du 30 juillet 1982 a lui aussi reconnu le caractère de taxes fiscales à la redevance d’assainissement. Mais, il convient d'observer, tout simplement, que la loi sur les prix et revenus n'opérait pas alors la distinction entre la rémunération pour service rendu à l'usager prévue à l'article 75-III et les sommes exigées des propriétaires qui ne se sont pas conformés aux obligations de raccordement prévues à l'article 75-II.

Pour résumer :

- Les redevances de l'article 75-II exigées des propriétaires qui ne se sont pas conformés à l'obligation de raccordement, ont peut-être le caractère de taxes ;

- Les redevances de l'article 75-III dûes < Pas d'accent circonflexe sur le "u". > par les usagers, ont certainement le caractère de rémunérations pour service rendu ;

- Comme la loi relative aux prix de l'eau pour 1984 ne vise que les redevances de l'article 75-III, le mécanisme prévu pour la détermination de leur taux n'est pas contraire à l'article 34 de la Constitution.

La nature juridique de Ta surtaxe communale et syndicale.

La surtaxe communale ou syndicale, malgré sa détermination, n'est en réalité qu'un élément constitutif < Un mot est illisible. >prix de l'eau qui n’apparaît de façon séparée dans les factures qu'en raison du choix du mode des conditions.

En effet, la surtaxe n'existe que lorsque le service de distribution d'eau est exploité en affermage, c¹est-à-dire, lorsque la collectivité a confié à une entreprise privée la gestion d'un réseau d'eau dont elle a préalablement supporté les frais d'installation.

Dans cette hypothèse, le prix de l'eau que doit payer l'usager comporte deux éléments :

- Le prix fermier à l'entreprise titulaire du contrat pour la couverture des charges de fonctionnement ;

- Et la surtaxe qui est encaissée par la société fermière mais reversée intégralement à la collectivité affermante. Cette surtaxe dont le montant est fixé par délibération de la collectivité correspond à la part d'investissement du coût global supporté par l'usager pour le service de distribution d'eau et d'assainissement.

Là encore, il n'est pas possible de reconnaître le caractère de taxes ou d'impositions de toutes natures aux surtaxes communales ou syndicales.

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En conclusion, il apparaît donc qu'avec les redevances visées à l'article 75-III et avec les surtaxes communales ou syndicales, le législateur n'a visé que des éléments qui ont le caractère de rémunérations pour service rendu ; et, qu'en conséquence, les dispositions de la loi ne sont pas contraire à d'article 34 de la Constitution.

En conclusion, je reconnais que la loi pourra avoir des conséquences fâcheuses sur les collectivités locales. Mais comme il n’y a pas de hiérarchie entre les lois ordinaires, une loi peut toujours revenir ou nuancer ce qu'a décidé une loi antérieure.

D'autre part, le raisonnement suivi par le Conseil en 1982 me paraît toujours applicable aujourd'hui et je ne vois pas les raisons qui pourraient nous conduire a < Il manque un accent sur le "a". >estimer que le mécanisme jugé suffisant en 1982 ne l'est plus en 1984.

C'est pourquoi, je me permets de vous proposer un projet de décision s'inspirant très largement de celle du 30 juillet 1982.

Monsieur le Président remercie le rapporteur et ouvre la discussion générale.

Monsieur JOZEAU-MARIGNE se déclare immédiatement très inquiet quant aux conséquences de cette loi sur la liberté des communes. Toute collectivité pour fournir de l'eau aux habitants doit faire face à des frais importants de travaux, de création ou d'amélioration des réseaux ; elle doit donc faire des emprunts importants ; si on retire à la collectivité la liberté de fixer le prix de l'eau, on met nécessairement en péril les finances de la collectivité locale.

Pour cette raison, Monsieur JOZEAU-MARIGNE déclare ne pas pouvoir voter la décision.

Monsieur LEGATTTE reconnaît en partie la réalité des propos de Monsieur JOZEAU-MARIGNE. Mais le seul problème qui doit intéresser le Conseil est celui de la constitutionnalité d'une loi pouvant avoir des incidences financières. Or, à ce sujet, le Conseil dans sa décision du 30 juillet 1982 a considéré "qu'en admettant que l'article 1er de la loi sur les prix et revenus soit de nature à compromettre l'application d'autres dispositions législatives et, notamment, de celles qui régissent l'équilibre financier de certains services communaux, cette circonstance serait sans incidence sur la conformité dudit article à la Constitution".

Monsieur VEDEL observe que les conséquences financières alléguées sont les conséquences nécessaires de tout blocage ou contrôle des prix. Et le blocage est un choix politique ; il n'y a pas là de problème constitutionnel.

Monsieur GROS attire l'attention du Conseil sur la qualification de la nature juridique des redevances prévues à l'article 75-II et 75-III en faisant observer que le Conseil d'Etat leur a reconnu le caractère de taxes, ce qui implique la compétence du législateur. Si l'on suit le raisonnement du rapporteur, le Conseil constitutionnel va adopter une jurisprudence différente de celle du Conseil d'Etat, ce qu'il n'a pas l'habitude de faire depuis des années, et ce qui pose toujours des problèmes.


Monsieur LEGATTE reconnaît l’importance du problème soulevé par Monsieur GROS mais il estime que la position du Conseil d'Etat ne doit pas être nécessairement sacralisée. En effet, sur le plan juridique, il est tout à fait possible d'accepter la thèse de la dichotomie entre les paragraphes II et III de l'article 75. Monsieur LEGATTE distingue alors trois cas : celui de l'article 75-II où l'on est en présence de taxes, celui de l'article 75-II et III où, par effet d'aspiration, on est en présence également de taxes, et celui de l'article 75-III où l'on est en présence d'une rémunération pour service rendu.

Monsieur LECOURT observe que la libre administration des collectivités locales doit s'exercer selon l'article 72 "dans, le cadre des lois". Ainsi pour le prix de l'eau la libre administration des communes s'est exercée d'abord dans le cadre de la loi de 1982 puis dans le cadre de la loi de 1984 ; on ne peut donc pas trouver pour annuler cette loi d'appui dans la Constitution.

Monsieur JOZEAU-MARIGNE exprime son désaccord car, en réalité, dans cette loi, le législateur a renvoyé au décret la fixation du prix de l'eau.

Monsieur LEGATTE répond que la loi distingue le prix de l'eau, les redevances, et les surtaxes. Il rappelle que sur ces trois points existe déjà une décision du Conseil déclarant la conformité à la Constitution.

Si le Conseil veut aujourd'hui annuler la loi, il lui faut une motivation particulière pour revenir sur sa jurisprudence d'il y a un an ; et Monsieur LEGATTE ne voit pas les raisons qui pourraient conduire à ce revirement de jurisprudence.

Monsieur VEDEL reproche au projet de décision de ne pas faire l'exposé des griefs des députés et des sénateurs auteurs de la saisine.

Monsieur LEGATTE répond qu’il a volontairement écarté cet exposé dans la mesure où il se rappelle que Monsieur GROS avait fait observer lors de la première séance à laquelle il participait, que le Conseil n'a à se préoccuper que de la loi dans son ensemble. A la limite on pourrait presque dire peu importe les moyens, car même s'il n'y avait pas de moyen dans la saisine, le seul fait d'être saisi nous impose d'examiner la loi dans son entier.

Monsieur VEDEL se déclare surpris par cette réponse et ne pensait pas soulever avec sa question un problème de rédaction aussi important. En effet, il ne faut pas oublier, comme l'a rappelé le Président Daniel MAYER au début de son mandat, que la rédaction de nos décisions doit se faire avec un souci pédagogique afin qu'elles soient comprises par le plus grand nombre.


Monsieur JOZEAU-MARIGNE se déclare tout à fait d'accord avec les propos de Monsieur VEDEL et ajoute que les limites de temps et de procédure que le rapporteur a bien voulu voir inscrites dans la loi, ne lui paraissent pas une garantie suffisante de constitutionnalité de la fixation du prix de l'eau par accord, ou part défaut, par décret.

Monsieur VEDEL ne comprend pas tellement pourquoi, d'ailleurs, le législateur doit être compétent pour fixer le prix le l'eau, alors qu'existe l'ordonnance de 1945 relative aux prix et qui donne en la matière compétence au pouvoir réglementaire.

Plus personne ne demandant la parole, le Président soumet le projet au vote. Le projet de décision est adopté par six voix et deux abstentions.

Monsieur le Président présente ses voeux à l'ensemble du Conseil et annonce une prochaine réunion le jeudi 19 janvier toute la journée et éventuellement le vendredi 20.

Monsieur JOXE, au nom de l'ensemble de ses collègues, remercie le Président et lui présente à son tour ses voeux les meilleurs.

La séance est levée 18 heures. < Il manque peut être un "à" avant l'heure. >

< Il y a des annexes. >