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PV1967-12-12

Gabriel MENISSIER

 SEANCE du 12 DECEMBRE 1967

 COMPTE-RENDU

 La séance est ouverte à 9 h. 30 en présence de tous les membres du Conseil.

 M. le Président informe le Conseil que la première affaire inscrite à l’ordre du jour porte sur l’examen de la nature juridique des dispositions de l'alinéa 2 de l’article 10 de la loi n° 64-707 du 10 juillet 1964 ; portant organisation de la région parisienne, en tant que ces dispositions désignent, en la personne du préfet de police, le haut fonctionnaire habilité à exercer, au nom de l’Etat, dans les départements des Hauts de Seine, de la Seine Saint-Denis et du Val de Marne, les pouvoirs et attributions définis par la loi des 10-15 juin 1853 et , les textes qui l’ont modifiée. 

 M. le Président donne la parole à M, DESCHAMPS, rapporteur de cette affaire, qui lit les dispositions ; ci-après de l’article 10 de la loi n° 64-707 du 10 juillet 1964 :

 "Dans la ville de Paris, le Préfet de police exerce les pouvoirs et attributions à lui conférés par : l'arrêté des consuls du 12 messidor an VIII et par les ; textes qui l'ont modifié.

 Dans les départements des Hauts de Seine, de la ; Seine Saint-Denis et du Val de Marne, le Préfet de police exerce les pouvoirs et attributions à lui conférés par la loi des 10-15 juin 1853 et les textes qui l'ont modifiée.


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 Dans les communes des départements visés à l’alinéa précédent, les maires exercent les pouvoirs et attributions à eux conférés par l’article 111 du code de l’administration communale.

 Toutefois le Préfet de police est chargé dans ces mêmes communes de tout ce qui concerne la liberté et la sûreté de la voie publique sur les voies à grande circulation".

 Le rapporteur rappelle que le Conseil n'est saisi que des dispositions de l’alinéa 2 précitées désignant le préfet de police comme le fonctionnaire chargé d’exercer certaines attributions qui lui sont conférées par la loi des 10 - 15 juin 1853.

 Or les dispositions de l'article 1er de cette loi attribuent au Préfet de police l’exercice, dans toutes les communes de la Seine, des fonctions qui lui sont déférées par l'arrêté des consuls du 12 messidor an VIII dont l'article 1er est ainsi rédigé : "Le Préfet de police exercera ses fonctions ainsi qu'elles sont déterminées ci- après, sous l'autorité immédiate des ministres ; il correspondra directement avec eux pour les objets qui dépendront de leurs départements respectifs".

 Il apparait donc à la lecture de ce texte que dans l'exercice des fonctions qui lui sont déférées par les dispositions combinées de l'arrêté des consuls du 12 messidor an VIII et de la loi des 10 - 15 juin 1853, le préfet de police n'agit qu'en tant qu'agent du gouvernement.

 Le Gouvernement entend désormais transférer certaines des attributions ainsi déléguées au préfet de police aux préfets de trois nouveaux départements de la région parisienne : Hauts de Seine, Seine St Denis et Val de Marne. A cette fin il doit donc modifier l'alinéa 2 de l’article 10 précité de la loi n° 64-707 du 10 juillet 1964 portant réorganisation de la région parisienne, texte de forme législative intervenu après la Constitution de 1958, c'est ce qui explique la saisine du Conseil.

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 Les dispositions qui font l'objet de cette saisine paraissent effectivement ressortir à la compétence du Gouvernement dans la mesure où elles n'ont pour objet que de répartir des compétences dévolues à l'Etat entre les diverses autorités auxquelles peut être délégué l'exercice des pouvoirs résultant de ces compétences.

 La dévolution à l'Etat de ces compétences est évidemment du domaine législatif mais non la répartition des dites compétences entre les délégués du Gouvernement. Ainsi en a d'ailleurs déjà décidé le Conseil constitutionnel dans sa décision des 17 - 19 mars 1964 relative à la R.T.F. (Recueil p. 33). En déclarant en effet que les dispositions de l'article 1er (1er alinéa, 1ère phrase) de l'ordonnance du 4 février 1959 relative à la R.T.F. étaient d'ordre législatif en tant qu'elles plaçaient la R.T.F. sous l'autorité du Gouvernement, le Conseil a laissé entendre, a contrario, que la désignation du membre du Gouvernement chargé d'exercer cette autorité était du domaine règlementaire.

 M. WALINE partage l'avis du rapporteur sur le caractère réglementaire des dispositions soumises au Conseil dès lors que l'extension des pouvoirs du Gouverne- ment a été faite par la loi du 10 juillet 1964.

M. CASSIN considère également la question sous un double aspect : d'une part le fait de soumettre les communes des nouveaux départements à un régime particulier et c'est la loi qui a édicté cette règle, d'autre part le fait d'attribuer aux préfets des nouveaux départements certaines attributions, notamment en matière de police sanitaire, qui ont toujours été de la compétence du préfet de police.

 M. LUCHAIRE constate que les attributions que le Gouvernement envisage de donner aux préfets des nouveaux départements paraissent être celles d'un agent de l'Etat à l'exception peut être tiret à rajouter entre "peut" et "être" ? de la désinfection qui semble relever du département. Cette distinction pourrait présenter un intérêt en cas d'action en responsabilité.

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 M. GILBERT-JULES estime que le Gouvernement ne peut ni étendre ni diminuer, par décret, les pouvoirs du préfet de police à l’égard des autres préfets, le préfet de police tenant ses propres pouvoirs de la loi.

 M. DESCHAMPS précise que la loi n’a pas donné les pouvoirs au préfet de police mais au Gouvernement.

 M. LUCHAIRE demande si les nouvelles attributions conférées aux trois départements de la région parisienne ne vont pas entraîner simultanément un transfert de dépenses à leur charge et par conséquent une modification dans le budget des collectivités locales intéressées.

 M. DESCHAMPS répond que ce transfert a été opéré par la loi du 10 juillet 1964 portant organisation de la région parisienne et M. LUCHAIRE convient que ses doutes sont levés par la lecture de l’article 36 de ladite loi instituant un fonds d’égalisation des charges départementales dans la région parisienne.

 M. DESCHAMPS donne alors lecture du projet de décision dont les motifs sont reproduits ci-après :

 "Considérant qu’aux termes de l’article 34 de la Constitution "la loi détermine les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités locales, de leurs, compétences et de leurs ressources" ;

 Considérant qu’il résulte de cette disposition que,: si le transfert de compétence d’une collectivité locale à l’Etat est une opération qui met en cause les principes fondamentaux ci-dessus énoncés et qui, par suite, relève du domaine de la loi, il appartient au pouvoir réglementaire de répartir, dans les limites de compétence ainsi tracées, et au sein de chaque collectivité, qu'il s'agisse de l'Etat ou des autres collectivités, les attributions entrant dans le domaine de ces compétences respectives entre les ; diverses autorités susceptibles de les exercer ;

 Considérant que les dispositions de l'article 10 alinéa 2, de la loi susvisée du 10 juillet 1964, soumises ! à l’examen du Conseil constitutionnel ont pour effet

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d’attribuer au préfet de police, dans les départements des Hauts de Seine, de la Seine Saint Denis et du Val de Marne, l'exercice des pouvoirs et attributions, l'autorisant, en vertu de la loi des 10 - 15 juin 1853, à exercer dans toutes les communes du département de la Seine les fonctions qui lui sont déférées par l'arrêté des Consuls du 8 messidor An VIII ainsi que par les textes qui ont modifié cette loi ; que, dans la mesure où des dispositions de la loi du 10 juillet 1964 ont pour effet de transférer à l'Etat, représenté par le préfet de police, des compétences qui appartenaient aux autorités municipales des communes de l’ancien département de Seine-et-Oise, désormais rattachées aux trois nouveaux départements susmentionnés, elles mettent en cause les principes fondamentaux ci-dessus rappelés et ont donc le caractère législatif ; mais que dans la mesure où elles tendant seulement à désigner, en la personne du préfet de police, l’autorité qui, dans lesdites communes, doit exercer au nom de l’Etat les attributions relevant de la compétence qui appartient à celui-ci en ce domaine, lesdites dispositions ne mettent pas en cause les principes fondamentaux ci-dessus rappelés non plus, d’ailleurs, qu'aucun des autres principes fondamentaux ni aucune des règles que l'article 34 de la Constitution a placés dans le domaine de la loi ; que, par suite, ces dispositions ressortissent à la compétence du pouvoir règlementaire.

 DECIDE :

Article premier - Les dispositions susvisées de l'alinéa 2 de l'article 10 de la loi n° 64-707 du 10 juillet 1964, portant réorganisation de la région parisienne, soumises à l'examen du Conseil constitutionnel, ont le caractère réglementaire, en tant que ces dispositions désignent, en la personne du Préfet de police, l'autorité habilitée à exercer au nom de l'Etat, dans les départements des Hauts^(; )de Seine, de la Seine Saint Denis et du Val de Marne, les pouvoirs et attributions définis par la loi des 10-15 juin 1853 et les textes qui l'ont modifiée.

Article 2 - La présente décision sera notifiée au Premier • Ministre et publiée au Journal officiel de la République française.

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 M. GILBERT-JULES propose la suppression, de la fin du 2e considérant à partir de : "et au sein de chaque collectivité, ..." et son remplacement par "les attributions de l'Etat".

 Cette proposition est adoptée.

 M. LUCHAIRE suggère ensuite de préciser dans le même considérant que c'est entre les délégués du gouvernement que le pouvoir réglementaire a la possibilité e répartir les compétences dans les limites qui lui ont été tracées par la loi, l'expression "délégués du gouvernement" étant celle qui figure à l'article 72, troisième élinéa, à corriger en alinéa ? erreur de frappe. de la Constitution et ayant l'avantage d'exclure les maires.

 M. MICHARD-PELLISSIER accepte cette modification. sous réserve toutefois qu‘il soit bien entendu que l'emploi de l'expression susvisée n'implique pas pour autant, par interprétation a contrario, que toute décision tendant à retirer à un maire un pouvoir qu'il exerce par délégation de l'Etat relève du domaine législatif.

 Le Conseil donne son accord à cette réserve.

 La décision ainsi modifiée est adoptée.

 L'original en sera annexé au présent compte-rendu.

 M. le Président PALEWSKI appelle la deuxième affaire inscrite à l'ordre du jour et portant sur l'examen de la nature juridique des dispositions de l'article 8 du décret n° 53-707 du 9 août 1953, relatif au contrôle de l'Etat sur les entreprises publiques nationales et certains organismes ayant un objet d'ordre économique ou social, telles que ces dispositions résultent de l'article 162 de l'ordonnance n° 58-1374 du 30 décembre 1958.

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 Le rapporteur de cette affaire est M. DESCHAMPS, qui cite tout d'abord les dispositions de l’article 8 susvisé du décret du 9 août 1953 qui sont les suivantes :

 "La compétence de la Commission de vérification des comptes, instituée par l'article 56 de la loi du 6 janvier 1948, peut être étendue par arrêté du ministre des finances et des affaires économiques, pris après avis ou sur proposition du président de la Commission :

 1 - Aux filiales d'entreprises déjà soumises aux vérifications de cette Commission, lorsque ces entreprises détiennent dans ces filiales, séparément, ensemble ou conjointement avec l'Etat, plus de 50 % du capital ;

 2 - Aux sociétés dans lesquelles des collectivités publiques, établissements publics ou personnes publiques détiennent, séparément, ensemble ou conjointe- ment avec l'Etat ou avec les entreprises déjà soumises aux vérifications de ladite Commission, plus de 50 % du capital, lorsque ces sociétés bénéficient du concours financier de l'Etat sous quelques forme que ce soit".

 Le rapporteur rappelle que le Conseil a déjà statué sur une affaire semblable dans sa séance du 18 décembre 1964 au cours de laquelle fut examinée la conformité à la Constitution de l'article 71 de la loi de Finances pour 1965 (décision n° 64-27 DC, Rec. p. 29). Il avait alors décidé que les dispositions dudit article n'étaient pas conformes à la Constitution en ce qu'elles étaient incluses dans un texte législatif alors qu'elles relevaient du domaine réglementaire. 

 Or ces dispositions prévoyaient notamment l'extension du contrôle exercé par la Commission de vérification des comptes des entreprises publiques aux filiales des établissements publics à caractère administratif et aux sociétés d'économie mixte dans lesquelles ces établissements publics ou leurs filiales détiennent plus de la moitié du capital.

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 A la suite de la décision du 18 décembre 1964 le Gouvernement a donc décidé de reprendre, par voie réglementaire, les dispositions de l'article 71 susvisé en étendant la compétence de la Commission de vérification aux filiales de la caisse des dépôts et consignations et à l'ensemble des filiales et sous filiales du secteur public national et local de manière à ce que la commission puisse avoir une vue complète de tous les cas d'actionnariat public direct ou indirect. Toutefois, un tel décret ne peut être pris sans l'avis du Conseil constitutionnel puisqu'il tend à modifier les dispositions de l'article 8 précité du décret du 9 août 1953 elles- mêmes modifiées par l'article 162 de l'ordonnance du 30 décembre 1958.

 M. DESCHAMPS reprend les développements qu'il avait déjà présentés dans son rapport lors de la séance du 18 décembre 1964 dont la copie est annexée au présent compte rendu. M. DESCHAMPS avait notamment montré dans ce rapport que depuis la loi du 17 août 1948 le fonctionnement et l'organisation de la Commission de vérification ont toujours été fixés par des textes réglementaires, que le "contrôle des finances publiques, de la gestion des entreprises nationales et des sociétés d'économie mixte" a volontairement été omis dans les matières énumérées à l'article 34 de la Constitution enfin que depuis la Constitution de 1958 de nombreux textes réglementaires sont intervenus¹ dans la matière dont il s'agit.

 Toutefois il y a eu deux "bavures" l'article 7 de l'ordonnance n° 59-74 du 7 janvier 1959 portant réforme du régime de l'émission dans les départements d'outre-mer et l'article 162 de l'ordonnance du 30 décembre 1958 portant loi de finances pour 1959 qui n'avait pourtant pour objet que de modifier un décret.

 Le rapporteur estime toujours que les dispositions dudit article ressortissent à la compétence du Gouvernement il insiste cependant sur le fait que les articles 6 et 7 de la loi du 17 août 1948 délèguent au pouvoir réglementaire la possibilité de prendre toutes dispositions relatives au contrôle des établissements publics à caractère

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industriel et commercial, des entreprises nationalisées et de divers autres organismes "ayant fait appel sous une forme quelconque au concours financier de l’Etat".

 Or le Gouvernement envisage maintenant de mettre fin à cette dernière restriction au motif qu'elle pourrait conduire certaines entreprises publiques, soumises au contrôle de la Commission, à soustraire une partie de leur activité à ce contrôle en créant des filiales et des sous filiales ne bénéficiant, du moins directement, d’aucun concours financier de l'Etat.

 Pour le rapporteur cela revient à supprimer les limites de la délégation consentie au pouvoir réglementaire par la loi du 17 août 1948. C'est pourquoi il convient de préciser ces limites. Beaucoup d'organismes dépendent des communes et le fait de les soumettre directe- ment au contrôle de la Commission fait porter atteinte à la libre administration des collectivités locales.

M. le Président PALEWSKI rappelle que les limites prévues par la loi de 1948 permettent aux filiales d'échapper au contrôle de la Commission.

 M. DESCHAMPS répond que ce problème existait déjà en 1948.

 M. MONNET pense que si une société bénéficiant du concours financier de l'Etat possède une participation dans une filiale cette dernière bénéficie par là même dudit concours.

 M. LUCHAIRE estime contrairement à ce que pense M. DESCHAMPS qu'il ne peut être fait de distinction quant au caractère législatif ou règlementaire entre le principe du concours financier de l'Etat et le pourcentage de participation directe ou indirecte au capital des organismes visés par le texte soumis au Conseil.

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 M. GILBERT-JULES déclare que le Conseil n’est absolument pas lié par la loi du 17 août 1948 puisqu’elle est antérieure à la Constitution et que par conséquent seul le Conseil d’Etat peut être appelé à déterminer celles de ses dispositions qui sont du domaine législatif ou règlementaire. Cette observation n'étant faite que dans l'hypothèse où, la décision, comme le projet, reposerait sur la loi de 1948.

 M. LUCHAIRE approuvé par M. MICHARD-PELLISSIER déclare que le Conseil doit fonder sa décision sur les dispositions de l'article 34 de la Constitution et non sur celles de la loi de 1948.

 M. WALINE admet que le Conseil a parfais fait référence à l'état' de la législation avant la Constitution mais c'était pour apprécier les limitatations déjà apportées à l'exercice de libertés publiques et non pour statuer sur la répartition des matières législatives et règlementaires qui ne peut résulter que de l'article 34 delà Constitution.

 Il est en conséquence décidé de supprimer dans les visas de la décision la référence à la loi du 17 août 1948.

 M, DESCHAMPS précise au Conseil que sur la base des dispositions de l'article 34 le texte soumis au Conseil touche au domaine législatif en ce qu'il peut concerner les libertés des collectivités locales dans le cas par exemple où les organismes soumis au contrôle de la commission pourront être des régies communales.

 M, CASSIN pense également que le contrôle de la Commission peut porter atteinte à certaines libertés et que par conséquent il doit être prévu par une loi aussi légitime soit-il.

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 M. GILBERT-JULES fait observer également que si la compétence de la Commission ressortit seulement au domaine du réglement à remplacer par "règlement" ? le Gouvernement peut l’étendre à toutes les sociétés*

 M. le Secrétaire Général propose alors de préciser dans la décision que les textes énumérant les organismes pouvant être soumis au contrôle de la Commission de vérification sont de nature réglementaire sauf pour le Gouvernement à ne pas dénaturer les textes qui régissent la compétence de ladite commission. Cette solution permettrait des recours contentieux dans les cas par exemple où le Gouvernement fixerait à un chiffre trop faible le pourcentage de participation des collectivités et organismes énumérés au paragraphe 2 de l'article 8 précité du décret du 9 août 1963 au capital des sociétés devant être soumises au contrôle de la Commission et le Conseil n’aurait pas à fixer un chiffre limite valable dans tous les cas.

 Cette proposition est approuvée et M. DESCHAMPS donne lecture du projet ci-après.

 "LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

 Saisi le 23 novembre 1967 par le Premier Ministre en application de l’article 37. alinéa 2 de la Constitution d’une demande lui soumettant l'examen des dispositions de l'article 8 du décret n° 53-7O7 du 9 août 1953 relatif au contrôle de l'Etat sur les entreprises publiques national les et certains organismes ayant un objet d'ordre économique ou social, telles que ces dispositions résultent de l'article 162 de l'ordonnance n° 58-1374 du 30 décembre 1958 ;

 Vu la Constitution et notamment ses articles 34, 37 et 62 ;

 Vu l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi : organique sur le Conseil constitutionnel et notamment ses articles 24, 25 et 26 ;


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 Vu les articles 56, 57, 58 et 59 de la loi du 6 janvier 1948 relatifs à diverses dispositions d'ordre budgétaire pour l'exercice 1958 et portant création de ressources nouvelles ;

 Vu le décret n° 53-707 du 9 août 1953 relatif au contrôle de l'Etat sur les entreprises publiques nationales et certains organismes ayant un objet d'ordre économique ou social et notamment son article 8 modifié par l'article 162 de l'ordonnance n° 58-1374 du 30 décembre 1958 ;

 Considérant que les dispositions susvisées soumises par le Premier Ministre à l'examen du Conseil constitutionnel pour l'appréciation de leur nature juridique au regard de l'article 34 de la Constitution et qui déterminent les cas dans lesquels la compétence de la Commission de vérification des comptes peut être étendue par arrêté du ministre des Finances et des Affaires Economiques, ne mettent en cause aucun des principes fondamentaux ni aucune des règles que ledit article 34 a placés dans le domaine de la loi ;

 Considérant, en effet, que lesdites dispositions ne relèvent pas des règles concernant la création de nouveaux ordres de juridiction, la création de catégories d'établissements publics, non plus que celles relatives aux nationalisations d'entreprises ou aux transferts d'entreprises du secteur public au secteur privé, énoncées par ce même article 34 de la Constitution ;

 Considérant que les dispositions dont il s'agit ne touchent pas davantage aux règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques ; que, si l'article 34 de la Constitution réserve à la compétence du législateur le soin d'édicter les règles concernant ces garanties fondamentales, lesdites règles doivent être appréciées dans le cadre des limitations de portée générale qui y ont été introduites par la législation antérieure à la Constitution en vue de permettre certaines interventions de la puissance publique jugées nécessaires en la matière ;

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 que, s'agissant du contrôle des entreprises publiques, des sociétés nationalisées et de leurs filiales, la détermination de ces règles doit s'analyser compte tenu du pouvoir très général de fixer les modalités de ce contrôle qui a été reconnu au gouvernement depuis la loi du 6 janvier 1948, dont l'article 56 modifié par le décret du 24 mai 1958 a institué la Commission de vérification des comptes des entreprises, publiques auquel il a donné, d'ailleurs , le caractère d'un organisme indépendant des autorités de tutelle et qu'il a doté de simples attributions consultatives ; que, notamment, la loi susvisée du 17 août 1948, tendant au redressement économique et financier de la nation, a expressément prévu, dans son article 7, qu'il y avait .lieu de ranger au nombre des matières relevant de la compétence du pouvoir réglementaire le "contrôle des établissements publics de l'Etat à caractère industriel et commercial, des entreprises nationales et des sociétés d'économie mixte, ainsi que des organismes ayant fait appel sous une forme quelconque au concours financier de l'Etat" ; que c'est dans le cadre de cette compétence réglementaire qu'ont été pris les décrets qui sont intervenus en ce domaine tant antérieurement à l'entrée en vigueur delà Constitution que postérieurement à celle-ci ;

 Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les dispositions susmentionnées de l'article 8 du décret n° 53-707 du 9 août 1953 telles qu'elles résultent de l'article 162 de l'ordonnance n° 58-1374 du 30 décembre 1958 ont le caractère réglementaire ; que, toutefois, en ce qui concerne les dispositions relatives aux sociétés visées au § 2 dudit article, ces dispositions ne sont réglementaires que dans "la mesure où elles peuvent être appliquées à des sociétés bénéficiant du concours financier de l'Etat sous quelque forme que ce soit ;

D E C I D E :

Article premier - Les dispositions de l'article 8 du décret n° 53-707 susvisé du 9 août 1953, telles qu'elles résultent de l'article 162 de l'ordonnance n° 58-1374 du 30 décembre 1958, soumises à l'examen du Conseil constitutionnel ont le caractère réglementaire, Toutefois, en ce qui concerne les dispositions relatives aux sociétés visées au § 2 dudit article, ces dispositions ne sont réglementaires que dans" remplacer le guillemet par un espace ? probable erreur de frappela mesure où elles peuvent être

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appliquées à des sociétés bénéficiant du concours financier de l’Etat sous quelque forme que ce soit.

Article 2 - La présente décision sera notifiée au Premier Ministre et publiée au Journal officiel de la République française."

 Il est proposé de supprimer dans les visas la référence à la précédente décision n° 64-27 DC du 18 décembre 1964 bien que M. DESCHAMPS ait fait observer que les décisions du Conseil s'imposent à tous et ne sont donc pas comparables à des jugements ou des arrêts.

 MM. LUCHAIRE et MICHARD-PELLISSIER répondent à cet argument que les décisions du Conseil ne portent néanmoins que sur des cas d'espèce et que sa jurisprudence peut évoluer.

 La suppression de la référence à une précédente décision est donc décidée.

 M, GILBERT-JULES propose de faire rédiger un nouveau projet de décision par M. le Secrétaire Général en accord avec le rapporteur puisque le précédent projet doit être complètement modifié à la suite des décisions prises par le Conseil.

 Cette proposition est adoptée et un nouveau projet sera soumis au Conseil en fin de séance.

 Ce projet sera alors adopté après quelques modifications de forme.

 L'original de cette décision sera annexé au présent compte-rendu.

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 La dernière affaire inscrite à l’ordre du jour porte sur l'examen de la nature juridique de certaines dispositions de l'article 1er de l'ordonnance n° 59-151 du 7 janvier 1959 relative à l'organisation des transports de voyageurs dans la région parisienne.

 Cette affaire est rapportée par M. ANTONINI qui rappelle tout d'abord que l'idée de la création d'un organisme chargé de la coordination des transports de voyageurs dans la région parisienne avait été conçue vers 1932 par M. Raoul Dautry qui essaya de la concrétiser en incitant le gouvernement à prendre le décret du 30 juillet 1937 créant "un comité de coordination des transports de la région parisienne". Ce comité avait pour mission "d'étudier le programme général des transports de cette région en vue d'assurer une exploitation rationnelle des divers modes de transport, de coordonner leur action ... d'éviter les concurrences préjudiciables à l'intérêt commun et à l'équilibre financier des exploitations".

 Par la suite les gouvernements successifs essayèrent par une série de mesures (décret du 12 novembre 1938, "loi" du 20 septembre 1940) de renforcer l'influence de l'autorité publique dans l'organisation des transports parisiens et d'unifier leur, exploitation alors concédée à la S.N.C.F. la compagnie du chemin de fer métropolitain de Paris (C.M.P.) et la société des transports en commun de la région parisienne (S.T.C.R.P.).

Cette évolution devait aboutir à la loi n° 48-406 du 21 mars 1948 créant la R.A.T.P. et lui confiant l'exploitation des lignes précédemment concédées à la C.M.P. et à la S.T.C.R.P.

 De plus cette loi remplaçait le conseil des transports parisiens institué en 1940 par un organisme rattaché au Ministère des travaux publics appelé "office régional des transports parisiens" habilité à prendre ou à proposer toutes les décisions relevant de l'autorité publique relatives aux transports en commun de voyageurs dans la région parisienne.

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 Cet office devait être remplacé en vertu de l'ordonnance n° 59-151 du 7 janvier 1959 par le "Syndicat des transports parisiens” remplacer le guillemet par un espace. erreur de frappedoté d’une structure, d’attributions, d’un rayon d’action et d’un financement comparables à ceux de l’ancien office régional.

 En fait à travers les divers changements de noms les pouvoirs publics ont essayé d’adapter l’organisme dont il s'agit au développement de la région parisienne.

 Toutefois l'objectif fixé au syndicat des transports parisiens n'a pu être atteint faute de moyens suffisants et de coordination avec le District.

 Le Syndicat semble être le seul organisme capable de promouvoir et coordonner une politique cohérente des transports dans la région parisienne mais jusqu'à présent.il a été condamné pour les raisons exposées plus haut à des interventions mineures.

Le Gouvernement entend donc réformer cet organisme de manière à lui donner plus d'efficacité notamment en le dotant "d'un patron et de ressources financières".

 Cette réforme ne peut évidemment intervenir qu'en modifiant l'ordonnance du 7 janvier 1959 et c'est ce qui explique la saisine du Conseil qui devra décider si certaines dispositions (1) de l'article 1er, reproduit ci-après, de l'ordonnance n° 59-151 du 7 janvier 1959, relative à l'organisation des transports de voyageurs dans la région parisienne sont de nature réglementaire ou législative :

Article 1er.- Il est constitué entre l'Etat, la ville de Paris, les départements de la Seine, de Seine et Oise, de Seine et Marne et de l'Oise, un syndicat doté de la personnalité morale, chargé de l'organisation des transports en commun de voyageurs dans la région dite "Région des transports parisiens", telle qu'elle est définie par décret.

Ces dispositions sont soulignées dans le texte ci-dessous.

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 Dans la région des transports parisiens, le syndicat, en conformité des règles de coordination des transports, fixe les relations à desservir, désigne les exploitants, définit le mode technique d’exécution des services, les conditions générales d’exploitation et les tarifs à appliquer. Il veille à l'établissement des plans d'investissement et assure leur coordination. En tant que de besoin, il passe avec les exploitants des conventions soumises à approbation par décret en Conseil d’Etat.

 Les charges résultant pour les collectivités publiques de l'exploitation des services de transports compris dans la région des transports parisiens sont réparties entre les membres du syndicat dans les conditions fixées par décret. *

 Le syndicat est admnistré "admnistré" à remplacer par administré. erreur de frappepar un conseil composé de trois représentants de l'Etat et de trois représentants des collectivités locales intéressées.

 Le statut du Syndicat est fixé par décret.

 Pour répondre à la question posée au Conseil le rapporteur estime qu'il importe tout d'abord de déterminer la nature juridique du syndicat des transports parisiens. C'est en effet à partir de cette première définition que pourront être recherchées les dispositions de l'article 34 de la Constitution applicables à l'espèce en cause. Or l'ordonnance de 1959 a seulement qualifié le syndicat des transports "d'organisme" et elle lui a donné la personnalité morale et non l'autonomie financière. Peut-on en conclure qu'il s'agit d'un établissement public ?

 M. DRAGO (1) estime que l'autonomie financière va de pair avec la notion d'établissement public,

 M. CONNOIS (2) pense au contraire que ce n'est pas là un des rouages essentiels et M. WALINE explique dans sa préface à l'ouvrage de M. DRAGO que "la notion d'établisse- ment public est d'un emploi constant et nécessaire, et qu'elle parait cependant impossible à définir rigoureusement".

"Les crises de la notion d'établissement public" p. 56
"La notion d'établissement public en droit administratif français"
.

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 Le problème reste donc entier pour le Conseil constitutionnel qui devra dire ce qu’est le syndicat des transports parisiens, le Gouvernement n’ayant pas posé la question au Conseil d’Etat.

 Trois hypothèses peuvent être envisagées :

 Ou bien le Syndicat des transports parisiens est un organisme sui generis, personnalité morale de droit public n’ayant pas d’autonomie financière, ou bien c’est un établissement publie appartenant à une catégorie préexistante ou encore c'est un établissement public constituant à lui seul une catégorie particulière.

 M. ANTONINI estime que c'est cette dernière solution qui doit être retenue.

 En effet le syndicat des transports parisiens est doté de la personnalité morale et implicitement d'une certaine autonomie financière, il assure une mission de service public dans le cadre d'une spécialité bien définie et sa structure ainsi que ses règles de fonctionnement sont celles d'un établissement public.

 Il faut d'ailleurs noter que le décret n° 67-890 du 6 octobre 1967 fixant la liste des établissements publics et des sociétés d'économie mixte dont le préfet de la région parisienne assure l'animation et le contrôle a rangé le syndicat des transports parisiens parmi les établissements publics.

 Si cet organisme est un établissement public il ne semble pas pouvoir être rattaché à une catégorie préexistante et notamment a là même catégorie que l'office régional des transports parisiens auquel il s'est substitué.

 En effet si ces deux organismes présentent de grandes analogies de structure et d'attributions ils sont cependant séparés par une différence essentielle puisque l'office régional n'avait pas la personnalité juridique et par conséquent n'était pas un établissement public.

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 Le syndicat des transports parisiens constitue donc à lui seul une catégorie particulière d’établissement public et il importe par conséquent pour déterminer la nature juridique des dispositions soumises au Conseil de rechercher si celles-ci peuvent être considérées comme des règles de création d’une catégorie d’établissement public au sens de l’article 34 de la Constitution.

 En ce qui concerne la nature juridique des dispositions portant attribution de l’autonomie financière la saisine du Conseil est maladroite car aucune mention de l'autonomie financière n'est faite dans le texte soumis au Conseil, aussi le Gouvernement lui a-t-il déféré les dispositions relatives à la personnalité morale du syndicat en faisant part dans la note jointe à la lettre de saisine de son intention d'ajouter à la personnalité morale l'autonomie financière.

 A cet égard il convient de savoir si les dispositions de l'article 19 de la loi n° 64-707 du 10 juillet 1964 portant réorganisation de la région parisienne n'ont pas conféré l'autonomie financière au syndicat des transports parisiens en lui transférant la propriété des biens immobiliers affectés aux exploitations de la R..AT.P. changer par R.A.T.P, erreur de frappe ? et appartenant précédemment au département de la Seine et à la Ville de Paris. Il ne semble pas qu'il en soit ainsi car la propriété d'immeubles n'implique pas obligatoirement l'existence d'un budget propre sans lequel il n'y a pas d'autonomie financière.

 Le problème qui se pose est donc de savoir si l'octroi d'un budget propre à un établissement public constituant à lui seul une catégorie ne doit pas être considéré comme une mesure constitutive relevant de ce fait du domaine législatif.

 Dans sa séance du 10 mars 1966 le Conseil constitutionnel a décidé, à propos des droits et taxes perçus dans les musées nationaux, que des dispositions tendant à soustraire au budget de l'Etat le produit de certains droits et taxes en vue de les affecter à un établissement public étaient de nature législative alors que les dispositions désignant l'établissement public au profit duquel seront perçus ces droits étaient de nature règlementaire.

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 En l'espèce il n’y a aucun transfert du budget de l’Etat au budget du syndicat des transports parisiens.

 De plus, on peut penser que 1'autonomie financière n’est pas un élément nécessaire à la création d'une catégorie d'établissement public et que par conséquent l'octroi de cette autonomie ressortit à la compétence du Gouvernement.

 En ce qui concerne les autres dispositions soumises au Conseil le rapporteur estime qu'elles sont également de nature réglementaire compte tenu notamment des limitations de portée générale déjà apportées dans les domaines qu'elles concernent.

 En effet ces dispositions comportent en premier lieu l'énumération des départements constituant le syndicat des transports avec l'Etat et la Ville de Paris. Le Gouvernement envisage de supprimer le département de l'Oise de cette énumération. Ce département n'a en fait jamais participé aux travaux du syndicat et n'y a jamais désigné de représentants. Sa radiation de la liste des collectivités locales membres du syndicat tend à accroître ses libertés et ne peut donc être subordonnée à une mesure législative. Il s'agit d'ailleurs d'un simple ajustement à l'aire géographique de la région parisienne telle qu'elle a été définie pas remplacer "pas" par "par" ? les textes récents la concernant et notamment la loi du 10 juillet 1964. La substitution matérielle des nouvelles collectivités composant la région parisienne aux anciennes collectivités ne saurait relever du pouvoir législatif.

 M. ANTONINI pense également que les dispositions soumises au Conseil des alinéas 2 et 4 de l'article 1er de l'ordonnance du 7 janvier 1959 relative à l'organisation des transports de voyageurs dans la région parisienne, sont également dé nature réglementaire car elles concernent les unes certaines attributions du syndicat des transports parisiens et les autres le nombre des représentants de l'Etat et des collectivités locales chargés d'administrer le syndicat.

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 Aucune de ces dispositions ne saurait donc, selon le rapporteur être considérée comme une des règles constitutives du syndicat des transports parisiens et, par voie de conséquence être placée dans le domaine législatif.

 M. le Président PALEWSKI remercie M. ANTONINI pouf son rapport et donne la parole à M. LUCHAIRE qui admet le caractère réglementaire des dernières dispositions citées par M. ANTONINI sous réserve que soit respecté le principe de la parité entre représentants de l'Etat et représentants des collectivités locales dans la composition du conseil d'administration du syndicat des transports parisiens. Le Conseil constitutionnel avait d'ailleurs adopté une solution analogue pour le Conseil d'administration de la R.A.T.P. dans sa décision n° 59-1 L du 27 novembre 1959 (Rec. p. 67).

 Quant à la question de la liste des collectivités locales participant au syndicat, M. LUCHAIRE pense qu'elle peut être examinée sous deux aspects : ou bien on considère simplement que le Gouvernement en rayant le département de l'Oise de la liste de ces collectivités lui rend en matière de transports une compétence dont il avait été privé ou au contraire on peut penser qu'en retirant du département de l'Oise la place qu'il avait dans la région parisienne on lui retire une de ses attributions.

 Dans ce cas il peut y avoir atteinte aux libertés d'une collectivité locale et par conséquent il faudrait un texte législatif.

 M. LUCHAIRE se demande cependant si la disposition soumise au Conseil n'a pas été abrogée par les dispositions de l'article 1er de la loi du 10 juillet ; 1964 portant réorganisation de la région parisienne qui : définissent l'aire géographique de cette région sans y inclure le département de l'Oise.

 Dans ce cas le Conseil n'aurait pas à j se prononcer sur la nature juridique du texte portant l'énumération des collectivités locales participant au syndicat des transports parisiens.

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 M. GILBERT-JULES ne croit pas que l'on puisse dire que le fait de retrancher un département de la liste des collectivités locales participant au syndicat est du domaine réglementaire alors que le fait d'en ajouter un serait du domaine législatif.

 Quant à la composition du conseil d’administration M. GILBERT-JULES estime que le principe de la parité est législatif mais que ce principe étant respecté le nombre des représentants de chacune des parties est réglementaire. Enfin M. GILBERT-JULES pense que l'autonomie financière aurait pu être accordée par le Gouvernement, si celui-ci n'avait pas soulevé le problème, comme une conséquence logique de la personnalité morale mais que dès lors que la question lui est posée le Conseil est tenu de déclarer qu'il s’agit d'une règle constitutive ressortissant donc à la compétence législative.

M. WALINE déclare que la liste des membres composant l'établissement public est également une règle constitutive et que par conséquent le texte qui exclurait le département de l'Oise du syndicat des transports parisiens devrait être législatif.

 M. MICHARD-PELLISSIER rappelle que pour l'attribution de l'autonomie financière le Conseil n'est pas saisi par la lettre du Premier Ministre et que par conséquent il ne doit pas statuer sur cette question.

 En ce qui concerne la liste des départements membres du syndicat des transports parisiens, M. MICHARD- PELLISSIER pense qu'elle est fonction de l'évolution de la notion de région parisienne et qu'il ne lui parait pas raisonnable de faire voter une loi fixant la liste desdits départements à chaque fois que cette notion va évoluer.

 Toutefois, M. MICHARD-PELLISSIER se déclare prêt à se rallier à la solution proposée par M. LUCHAIRE tendant à dire que c'est la loi du 10 juillet 1964 qui a fixé les limites de la région parisienne.

 M. CASSIN estime qu'il faut une loi pour accorder l'autonomie financière à une catégorie d'établissement public, un établissement public étant présumé avoir cette autonomie ; si, par exception, il ne l'a pas et qu'il faut la lui donner il s'agit bien d'une règle constitutive nouvelle.

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 Quant au problème de la liste des départements appartenant au syndicat, M. CASSIN considère qu'il peut être rattaché à deux catégories différentes des dispositions de l'article 34 : celles qui concernent les établissements publics et celles qui ont trait aux libertés des collectivités locales.

 Si l'on fait application des premières de ces dispositions, M. CASSIN ne pense pas que la modification de la liste des "associés" constituant le syndicat doive intervenir sous forme de loi. Le problème est toutefois plus délicat si l'on fait appel à la notion de libertés des Collectivités locales. Dans ces conditions, M. CASSIN se demande si le Conseil ne pourrait pas dire que la liste des départements en cause a été abrogée par les textes postérieurs portant organisation de la région parisienne.

 Le Conseil approuve cette suggestion à l'exception de M. WALINE qui rappelle que la loi du 10 juillet 1964 a défini l'aire géographique de la ragion "ragion" à modifier par région. erreur de frappe parisienne et non celle de la région des transports parisiens nécessairement plus vaste compte tenu des implantations toujours plus lointaines de personnes venant travailler à Paris

 M. WALINE déclare voter pour le caractère législatif des dispositions soumises au Conseil du 1er alinéa de l’article 1 de l'ordonnance précitée n° 59-151 ; du 7 janvier 1959.

 M, ANTONINI précise que la région des transports parisiens a été définie en fait par le décret du 30 août 1963 et que c'est peut être rajouter un tiret entre "peut" et "être" ? à ce texte qu'il faudrait faire référence.

 M. LUCHAIRE répond qu'il importe quand même de fixer certaines limites au Gouvernement et celles-ci pouvant résulter que d'une loi, c'est donc plutôt la loi du 10 juillet 1964 qu'il convient de citer.

Cette proposition est adoptée par le Conseil.

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 M. ANTONINI donne ensuite lecture du projet de décision dont les considérants sont reproduits ci-après :

 Considérant que l’article 34 de la Constitution a réservé à la loi la fixation des règles concernant la création de catégories d'établissements publics ;

 Considérant que le Syndicat des Transports parisiens constitue une catégorie particulière d'établissement public, sans équivalent sur le plan national ; que, dès lors, le législateur est seul compétent pour fixer ses règles de création, lesquelles comprennent nécessairement ses règles constitutives ; qu'au nombre de ces dernières il y a lieu de ranger en particulier, à l'exclusion de celles relatives à l'autonomie financière de l'établissement public, les dispositions qui déterminent sa personnalité juridique et celles qui fixent le cadre général de la mission qui lui est impartie dans l'organisation des Transports en commun de voyageurs dans la "Région des Transports parisiens"

 Considérant que relèvent de la compétence du législateur, par application des principes ci-dessus rappelés, les dispositions édictées par l'article 1er (1er alinéa, 1ère phrase) de l'ordonnance susvisée du 4 février 1959 en tant que, par cette disposition, le Syndicat des Transports parisiens est "doté de la personnalité morale" ;

 Considérant, au contraire, que ne présentent pas le caractère de règles constitutives ni, par suite, le caractère législatif :

 1°- Les dispositions contenues dans le deuxième alinéa (2ème et 3ème phrases) du même article, relatif à l'établissement et à la coordination des plans d'investissement ainsi qu'aux conventions que le Syndicat peut être appelé à passer avec les exploitants lesdites dispositions n'ayant trait qu'à des modalités d'exécution de la mission confiée à cet organisme dans l'organisation générale des transports en commun de voyageurs dans la région parisienne ;

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 2°) Les dispositions contenues au 4ème alinéa du même article, en tant qu'elles fixent à 3 le nombre des représentants de l'Etat et celui des représentants des collectivités locales intéressées au Conseil d'administration du Syndicat des Transports parisiens, le nombre de ces représentants ne pouvant être regardé comme relevant d'une des règles constitutives de la création de cet établissement ;

 Considérant, enfin, que, dans la mesure où elles comprennent les départements de la Seine, de la Seine-et-Oise et de l'Oise dans l'énumération des collectivités publiques constituant le Syndicat des Transports parisiens, les dispositions du 1er alinéa de l'article 1er de ladite ordonnance ne touchent à aucun des principes fondamentaux ni à aucune des autres règles que l'article 34 de la Constitution a placés dans le domaine de la loi ; que, notamment, elles ne portent pas atteinte aux principes fondamentaux concernant la libre administration des collectivités locales lesquels doivent être appréciés compte tenu des limitations de portée générale tracées par la législation antérieure à la Constitution et sous réserve que l'aire géographique dans laquelle s'exerce l'activité du Syndicat ne saurait être étendue à d'autres collectivités territoriales que celles énumérées à l'article, 1er alinéa, de l'ordonnance susvisée du 7 janvier 1959 ; que, dès lors, ces dispositions ressortissent aussi à la compétence du pouvoir réglementaire ;

 DECIDE :

Article premier - Ont le caractère législatif les dispositions de l'article 1er, 1er alinéa, de l'ordonnance susvisée du 7 janvier 1959, en tant qu'elles précisent que le Syndicat des Transports parisiens est doté de la personnalité morale.

Article 2 - Ont le caractère réglementaire, compte tenu toutefois des limitations et réserves ci-dessus exprimées, les dispositions de l'alinéa 1er de l'article 1er de ladite ordonnance en tant qu'elles comprennent les départements de la Seine, de la Seine et Oise et de l'Oise dans l'énumération des collectivités publiques constituant le Syndicat des Transports parisiens ;

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 Les dispositions de l’alinéa 2 (2ème et 3ème phrases) du même article ont également le caractère réglementaire ainsi que celles de l’alinéa 4, en tant qu’elles fixant à 3 le nombre des représentants de l’Etat et celui des représentants des collectivités locales intéressées au Conseil d’administration du Syndicat des Transports parisiens.

Article 3 - La présente décision sera notifiée au Premier Ministre et publiée au Journal officiel de la République française.

 Il est décidé de supprimer dans le premier considérant les mentions relatives à l'autonomie financière.

 Le dernier considérant est également amendé dans le sens proposé par M. LUCHAIRE.

 Après quelques modifications de forme la décision est adoptée. L'original en sera annexé au présent compte rendu.

 Avant la fin de la séance sur une question de M. CASSIN, M. le Président PALEWSKI précise que l'affaire relative aux élections législatives de Bastia ne peut être examinée dans l'immédiat certaines pièces (notamment les listes d'émargement d'un bureau) étant encore entre les mains des experts commis par le juge d'instruction.

M. LUCHAIRE propose que le dossier soit soumis à une section du Conseil qui décidera si l’affaire ne peut être examinée au fond même sans les pièces dont il s'agit.

La séance est levée à 12 h. 40.

Les instructions de transcription ont été communiquées aux étudiantes et aux étudiants.