[7] Déclassement
Nature juridique des dispositions de l'article 1106-16 du code rural, tel qu'il résulte de l'article 2 de la loi n° 61-89 du 25 janvier 1961 et de l'article 1162 du même code, tel qu'il résulte de l'article 2 de la loi n° 72-965 du 25 octobre 1972
(n° 82-126 L)
[19] Autres nominations : rapporteurs-adjoints et délégués
Décision du 12 octobre 1982 portant nomination de rapporteurs adjoints près le Conseil constitutionnel
Le Conseil se réunit à 10 heures tous ses membres étant présents à l'exception de Monsieur Valéry GISCARD d'ESTAING, excusé.
Monsieur le Président indique que l'ordre du jour de la présente séance est :
1° Nomination, en application de l'article 36 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel des rapporteurs-adjoints près le Conseil constitutionnel pour la période octobre 1982 à octobre 1983.
2° appréciation, en application de l'article 37, alinéa 2, de la Constitution, de la nature juridique des dispositions des articles suivants du Code rural :
- article 1106-16, tel qu'il résulte de l'article 2 de la loi n° 61-89 du 25 janvier 1961 ;
- article 1162, tel qu'il résulte de l'article 2 de la loi n° 72-965 du 25 octobre 1972.
Rapporteur : Monsieur louis GROS
Messieurs,
L’ordre du jour prévoit la désignation des rapporteurs adjoints auprès du Conseil constitutionnel pour la période octobre 1982 - octobre 1983.
En effet, l'article 36 de l'ordonnance n° S8-1958 du 7 novembre 1958, portant loi organique sur le Conseil constitutionnel dispose que "chaque année, dans la première quinzaine d'octobre, le Conseil constitutionnel arrête une liste de dix rapporteurs adjoints choisis parmi les maîtres des requêtes au Conseil d'Etat et les conseillers référendaires à la Cour des Comptes."
Conformément à l'usage, j'ai demandé au Vice-Président du Conseil d'Etat et au Premier Président de la Cour des Compte de bien vouloir nous proposer respectivement les noms de cinq maîtres des requêtes et de cinq conseillers référendaires.
Sur l'avis favorable de M. Pierre NICOLAY, je propose de reconduire pour un an dans leurs fonctions les maîtres des requêtes qui sont actuellement rapporteurs adjoints auprès du Conseil constitutionnel à l'exception toutefois de MM. Michel MORISOT et Alain BACQUET qui, ayant été nommés récemment conseillers d’Etat, ne peuvent plus être rapporteurs adjoints.
Pour les remplacer, je vous propose, avec l'accord du vice-Président du Conseil d'Etat, de nommer
MM. Jean-François de REYDET de VULPILLIERES et Daniel LABETOULLE tous deux maîtres des requêtes au Conseil d'Etat qui joignent à une très solide formation juridique acquise au sein des formations contentieuses du Conseil d'Etat une bonne expérience administrative.
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M. Jean-François de REYDET de VULPILLIERES, né le 20 décembre 1937, diplômé d'études supérieures de droit public et de l’institut d'études polititques de Paris, est sorti de l’Ecole nationale d'administration pour entrer au Conseil d'Etat comme auditeur en 1965. Maître des requêtes en 1972, il a été successivement directeur de cabinet de M. Xavier DENIAU, Secrétaire d'Etat auprès du Premier Ministre et directeur de la Jeunesse et des activités socio-éducatives au Secrétariat d'Etat à la Jeunesse et aux sports. Il est actuellement rapporteur auprès de la 8ème sous-section du contentieux et auprès de la section de l’intérieur.
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En ce qui concerne les rapporteurs adjoints issus de la Cour des Comptes, je vous propose également, sur l’avis favorable de M. Bernard BECK, de reconduire pour un an les rapporteurs adjoints actuellement en fonction et qui sont : MM. Pierre LAFAYE, François REYMOND de GENTILE, Guy THUILLIER, Philippe LIMOUZIN-LAMOTHE et Alain LAMASSOURE.
Avant de vous demander d'approuver la décision qui vous est présentée concernant l'ensemble de ces nominations, je tiens à exprimer mes regrets du départ de MM. Michel MORISC et Alain BACQUET, qui étaient auprès de nous comme rapporteurs adjoints depuis de nombreuses années et à les remercier de la précieuse collaboration qu'ils nous ont apportée.
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II. APPRECIATION DE LA NATURE JURIDIQUE DES DEUX ARTICLES DU CODE RURAL
Monsieur GROS présente le rapport ci-après :
Le 28 septembre 1982, le Premier ministre a saisi le Conseil constitutionnel de la nature juridique de deux articles du Code rural. L'article 1106-16,tel qu'il résulte de l'article 2 de la loi n° 61-89 du 25 janvier 1961 et l'article 1162,.tel qu'il résulte de l'article 2 de la loi n° 72-965 du 25 octobre 1972.
Ces deux articles sont relatifs à la dispense d'affranchissement des correspondances en matière de sécurité sociale. Le Gouvernement nous indique que le déclassement demandé a pour objet de lui permettre de les abroger dans le cadre du plan d'économies en matière de sécurité sociale.
L'article 63 de cette ordonnance est conçu comme suit : un arrêté du Ministre du travail et de la sécurité sociale, du Ministre des Postes Télégraphe et Téléphone et du Ministre des finances fixe les conditions dans lesquelles bénéficient de la franchise postale les objets de la correspondance adressée ou reçue par le service de la sécurité sociale. La dispense résultant de cette franchise fait l'objet d'un forfait dont le montant, fixé annuellement par la loi de finances est remboursé au budget des Postes Télégraphe et Téléphone. Vous constatez à la lecture de ces textes qu'il ne s'agit pas d'une franchise comme le dit de façon quelque peu inexacte la note du Gouvernement mais d'une simple facilité pour l'expédition des correspondances intéressées sans aucune exonération mais avec un transfert de la charge de l'affranchissement de l'assuré à l'organisme de sécurité sociale. Pour des raisons pratiques aisées à comprendre, la dépense: dont il s'agit n'est pas calculée en totalisant le prix de toutes de les correspondances mais fait l'objet d'un forfait annuel payé par un organisme de sécurité sociale aux P.T.T. Par ce système l'assuré ne paie rien pour l'acheminement de son courrier, c'est l'organisme de sécurité sociale qui a la charge de toutes les correspondances aussi bien celles qu'il expédie que celles qu'il reçoit. Ce forfait compte tenu des garanties que l'on a voulu assurer tant pour le financement des services postaux que pour les charges imposées à la sécurité sociale est fixé chaque année par le Parlement dans la loi de finances. Comme vous le voyez cet article 63 prévoit un régime cohérent et complet. La charge est transférée de l'assuré à l'organisme, son montant est évalué forfaitairement et cette dépense des caisses est contrôlées par le Parlement dans la loi de finances.
Ce système de l'article 63 est toujours en vigueur depuis 1945. On pourrait penser qu'il s'agit là d'un mécanisme un peu lourd pour une question mineure, mais comme je vous l'ai dit le Parlement entend assurer le financement des P.T.T. et vérifier que l'on n'impose pas une dépense trop lourde aux organismes de sécurité sociale. La somme que représente ce forfait est d'ailleurs considérable, puisque seulement pour le régime agricole, qui n'est qu'une part minime de l'ensemble de la sécurité sociale, le forfait retenu par la loi de finances de 1982 se montait à la somme de 88 700 787 francs.
La supression de cette franchise postale au bénéfice des assurés représentera dont une économie importante mais pas équivalente au montant des forfaits puisque ceux-ci couvraient également la partie du courrier des caisses vers les assurés.
Nous savons par ailleurs, que le paiement de ces correspondances est une charge fixée par la loi de finances pour les organismes de sécurité sociale. Il en résulte ainsi une règle du fonctionnement de ces établissements publics qui n'est pas détachable de leur définition et qui semble bien constituer une de ces règles constitutives dont notre jurisprudence reconnaît le caractère législatif. Nous voyons ainsi que la question même du principe de la franchise des courriers de la sécurité sociale est relativement difficile et que l'on ne saurait la déclarer réglementaire sans une assez ample réflexion. Mais cette question ne nous est pas posée.
L'article 63 de l'ordonnance de 1945 institue le système de dispense dont il s'agit et il résulte de son article premier que cette disposition est applicable à tous les régimes de la sécurité sociale, c'est d'ailleurs bien ainsi que cet article a été interprété lors de la codification du Code des Postes en 1952. Le texte de l'ordonnance qui institue ce système étant antérieur à la Constitution de 1958, c’est au Conseil d'Etat qu'il reviendra exprimer un avis sur sa nature, une telle question ne saurait vous être posée en application de l'article 37 de la Constitution. Il semble d'ailleurs résulter, d'une conversation du rapporteur avec Madame MEME, rapporteur de cette affaire devant le Conseil d'Etat, que celui-ci estimera le transfert de la charge de l’usager sur la sécurité sociale, une disposition de nature législative. On ne saurait rien inférer à la jurisprudence antérieure du Conseil d’Etat à ce sujet puisqu'ayant à prendre partie sur la nature juridique de ces dispositions il les a qualifiées une fois réglementaires et une fois législatives, ceci à l'occasion de codification ou de consultation sur des projets de loi.
Ces explications étant données, la lecture attentive de nos textes vaincus permettre de mieux en voir la portée.
Article 1106-16 du Code rural (loi de 1961). "Un arrêté du du Ministre de l'agriculture, du Ministre des finances et des affaires économiques et du Ministre des Poste et Télécommunication fixe les conditions dans lesquelles bénéficient de la dispense d'affranchissement les correspondances relatives au service de l'assurance obligatoire instituée par le présent chapitre". Cet article, comme vous le voyez, n'institue pas un système de dispense d'affranchissement qui devrait dire à la charge de qui il est et comment il est payé mais se contente, lors de la création d'un nouveau régime agricole, d'introduire parmi les autorités compétentes; pour déterminer les conditions de fonctionnement du système de dispense existant, le Ministre de l'agriculture : la seule différence qu'il comporte avec le texte précédent, le complément qu'il y apporte, tient dans ces mots : "du Ministre de l' agriculture”.
Sur l'invitation de Monsieur le Président, Monsieur GROS lit au Conseil le texte de la décision qu’il lui propose d'adopter.
Monsieur VEDEL indique que l'abrogation des textes qui nous sont soumis fera tomber la dispense d'affranchissement pour ce régime, la loi n'ayant plus en ce qui les concerne de textes d'application.
Monsieur GROS lui répond que si le Conseil d'Etat déclare que les textes de 1945 sont de nature législative, le Gouvernement ne sera pas autorisé à les modifier par décret et il ne sera pas davantage habilité à empêcher leur application par l'abrogation pure et simple des textes qui sont nécessaires pour celle-ci.
Aucun autre membre ne demandant à intervenir, la discussion générale est close et la décision est adoptée à l'unanimité telle qu'elle est jointe au présent procès-verbal.
La séance est levée à 10 h 50.
Les instructions de transcription ont été communiquées aux étudiantes et aux étudiants.