La séance est ouverte à 15 heures en présence de tous les conseillers à l'exception de Monsieur ROBERT excusé.
Monsieur le Président : Bien, en l'absence de Monsieur ROBERT, nous allons tout de même examiner le texte rituel des observations que le Conseil est amené à faire après chaque élection nationale. C'est Monsieur SCHRAMECK qui nous servira de rapporteur et je l'en remercie.
(Monsieur SCHRAMECK prend à la table des rapporteurs adjoints. Il donne quelques indications sur l'ordre du jour sur les prochaines séances et notamment sur l'examen de la demande en récusation de Monsieur VALAT, présentée par Monsieur ESTROSI et l'examen de la contestation portant sur la 8ème circonscription de la Loire-Atlantique).
Monsieur SCHRAMECK : Je me contenterai de brèves indications puisque les observations qui sont soumises se suffisent à elles-mêmes.
I. Le premier point qui paraît essentiel provient de la nécessité d'empêcher que ne se reproduisent des candidatures destinées uniquement à collecter des fonds publics. Tel est le cas de l'opération montée par Monsieur Manovelli. Chaque voix destinée à celui-ci a rapporté 9,10 Francs par an compte tenu des crédits inscrits dans le budget. Naturellement, il n'y a pas de poursuite, de tels faits ne relèvent pas du juge pénal. Le premier point des observations est destiné à mettre en évidence le détournement qui peut résulter des dispositions de la Içji du 11 mars 1988 et à suggérer des moyens d'y remédier. Il faut également constater que le juge de l'élection est dans l'incapacité d'empêcher une telle manoeuvre dès lors que les candidatures sont formellement régulières.
Monsieur ABADIE : Je souhaiterai m'exprimer sur le principe général. J'ai des interrogations. Je suis d'accord pour des propositions qui toucheraient au domaine réglementaire. Il n'y en a peu. Je suis d'accord aussi pour des dispositions de nature législative. Mais j'ai la crainte suivante, s'agissant de ces dispositions sur le financement. Les textes de 1988 et de 1990 sont essentiels dans leur fondement comme dans leurs effets, ils maintiennent l'égalité entre les candidats et sont des freins à l'action des groupes professionnels ou des entreprises qui n'hésitent pas à proposer leur argent pour financer des campagnes électorales. J'ai la crainte qu'en proposant des mesures législatives, le Parlement n'en profite pour prendre des mesures favorables aux groupes de pression. J'ai la crainte que des modifications légitimes ne servent de prétexte à d'autres qui le seraient moins. Il y a déjà eu des propositions pour insister sur la bonne foi des candidats. Je vois un risque dans l'intervention du Parlement.
Monsieur le Président : Qui d'autre veut intervenir ?
Monsieur FABRE : Il ne faut pas à chaque instant se demander si nos propositions relèvent du règlement ou de la loi. Il est clair que nous avons été confrontés à certaines difficultés comme celles liées à Monsieur MANOVELLI. Cela relève-t-il du décret ? Je ne crois pas. Nous avons simplement à constater les problèmes posés par le fonctionnement de l'ensemble de la compétition électorale. Il s'agit pour nous d'un avis. Nous verrons bien ensuite ce qu'il en adviendra. Mais nous ne pouvons pas considérer a priori que le Parlement est suspect et nourri d'intentions indignes.
Monsieur le Président : Oui je partage cet avis, nous n'avons pas à tenir la plume du législateur mais simplement à tirer les leçons de ce que nous avons vécu avec le contentieux, et qui n'a pas toujours été agréable. Ce n'est pas à nous à dire quelles sont les mesures à prendre mais simplement à constater les difficultés posées par l'application des textes.
Madame LENOIR : La remarque de Monsieur Abadie pourrait toutefois être étayée par certains des éléments de la note, qui ne se bornent pas à un constat mais qui suggèrent des modifications.
Monsieur le Président : Le mieux est que nous prenions tout cela dans l'ordre et que nous voyons point par point comment rédiger. (Assentiments)
Monsieur SCHRAMECK : Le I de la note fait suite aux agissements de Monsieur MANOVELLI. Il faut rappeler que chaque voix recueillie par les candidats qu'il a présenté, parfois à leur insu, lui ont rapporté 9,10 F par an. Il s'agit d'un détournement de l'objet même du financement des partis politiques. Aucune poursuite ne paraît possible dès lors qu'il n'y a pas eu d'infraction pénale. Il devient indispensable d'empêcher que des démarches identiques se reproduisent. Pour ce faire, trois thèmes vous sont proposés. Le premier, ce sont les dispositions qui pourraient combler les lacunes de la législation mise en évidence par Monsieur MANOVELLI. Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 11 janvier 1990 a censuré un plancher de 5 % des voix pour participer à la répartition du financement. Pour autant, un autre seuil serait possible. La deuxième question concerne, toujours sur le même sujet, les déclarations de candidature. La troisième question, abordée par ie point n° 4, concerne les sanctions à prévoir. Il est proposé notamment d'imposer aux candidats une présentation personnelle. C'est la proposition la plus exigeante. Elle présente l'avantage de couper court à des candidatures factices et l'inconvénient d'être une contrainte pour un candidat, notamment pour les plus connus d'entre eux. Je dois ajouter que j'ai consulté quelques membres du Conseil d'Etat qui m'ont fait part de leur accord.
Monsieur le Président : Oui, on peut tout de même faire acte de candidature aux législatives. Le préfet ira saluer tel ou tel candidat bien connu, devant les journalistes. Ça fera très bien !
Monsieur SCHRAMECK : Le montant du cautionnement est particulièrement faible. La modification proposée ne porte pas sur ce montant mais sur le caractère non seulement substantiel mais également personnel de ce versement.
Monsieur le Président : Oui, mille francs à sortir personnellement ce n'est pas négligeable.
Monsieur FAURE : Beaucoup ne l'auraient pas fait.
Monsieur RUDLOFF : Faut-il que ce soit versé sur un compte personnel ? Ne peut-on pas envoyer un chèque du parti ?
Monsieur ABADIE : Le chèque doit provenir du compte du candidat, ce qui aurait condamné la manoeuvre de Monsieur MANOVELLI. Sur le thème précédent, j'observe que le point 1 permet au Parlement de fixer un seuil inférieur à 5 %.
Monsieur le Président : Oui, c'est cela. 5 % c'est beaucoup. C'est trop. Mais un seuil inférieur 3 % serait par exemple possible. Notre décision n'a pas condamné tout seuil.
Monsieur le Secrétaire général : Même certains quotidiens sérieux ont affirmé que le Conseil constitutionnel avait ouvert la voie aux fraudeurs. Enfin, le Conseil souhaite-t-il attirer l'attention sur le fait que la seule sanction légalement prévue est l'inéligibilité, ce qui n'a pas vraiment d'importance pour les personnes dont le seul objectif est financier ? Il y a en effet un paradoxe dans le fait que cette sanction est dépourvue de tout effet pratique. C'est le point 4 de ce qui vous est proposé.
Monsieur le Président : Sur ces quatre points nous allons lire d'abord et nous discuterons ensuite.
Monsieur SCHRAMECK lit le I de la note.
Monsieur RUDLOFF : Je me demande s'il ne faudrait pas assortir ces remarques de considérations statistiques.
Monsieur le Secrétaire général : Dans le recueil, des statistiques électorales apparaissent.
Monsieur le Président : Oui, mais on pourrait les mettre ici aussi, ça montrera bien la charge de travail que nous avons subie sans pouvoir priver Monsieur Manovelli de subventions publiques.
Monsieur le Secrétaire général : Je rappelle en quelques mots le
Monsieur RUDLOFF : On pourrait également insister sur la période qui nous est laissée pour statuer.
Monsieur le Président : Oui, mais c'est évoqué plus tard.
Madame LENOIR : Est-ce que la Commission des comptes de campagne nous a envoyé son bilan ?
Monsieur ABADIE : Oui, mais il y a quelques différences minimes de chiffres.
Monsieur le Secrétaire général : Je me permets de suggérer au Conseil un amendement dans le deuxième paragraphe. Il faut indiquer que certains comptes n'ont pas été déposés.
Monsieur le Président : Oui, mais en ce qui concerne Manovelli, j'ai demandé au Ministère de la Justice de me tenir au courant.
Monsieur RUDLOFF : Aux élections cantonales il a été battu.
Monsieur le Président : Le point 1 me paraît essentiel, il est incitatif, c'est vrai. Mais il est essentiel.
Monsieur RUDLOFF : Oui, le 1 est le plus important. Les 2 et 3 sont des éléments plus ponctuels de réponse au cas Manovelli.
Monsieur le Président : Vous souhaitez qu'on inverse ?
Monsieur RUDLOFF : Non, je veux simplement dire que ce n'est pas 1, 2, 3 mais 1 puis 2 et 3 .
Monsieur ABADIE : Ce n'est pas certain. C'est vrai que l'absence de seuil a rendu possible la fraude Manovelli, encore que dans certaines circonscriptions il a dû obtenir 5 %.
Monsieur le Président : Bon, alors, on laisse le point 1 en tête.
Monsieur FAURE : Oui, il vaut mieux un seuil qu'une obligation de déclaration personnelle et de versement du candidat.
Monsieur le Président : Reste le point 4 qui est le plus délicat. Il me semble que nous devenons législateurs, or il s'agit de nos propres pouvoirs. Cela ne dépend pas vraiment de nous. Je suis réticent. Je me demande si les points précédents ne suffisent pas. Les exigences de dépôt de la candidature et de versement personnel vont raréfier le nombre de plaisantins ou de personnes dont le seul intérêt est lucratif. Mais sur le point 4 on dit quelque chose de beaucoup plus général, dont nous avons déjà eu à connaître.
Monsieur LATSCHA : Je prends le cas de Rinaldi. Il n'y a eu ni fraude ni manoeuvre : ses électeurs ne se sont pas trompés, ils ont bel et bien voulu voter pour lui.
Monsieur le Président : Oui, c'est très différent des escroqueries.
Monsieur LATSCHA : Est-ce qu'on ne pourrait pas rédiger différemment ce point, par exemple en se contentant de poser la question. La difficulté concrète, c'est qu'il nous arrive d'annuler quelques bulletins.
Madame LENOIR : Moi, je me demande s'il ne faut pas réserver cette sanction pécuniaire aux cas dans lesquels il y a une fraude.
Monsieur le Secrétaire général : La difficulté c'est que le Conseil ne se borne pas à une analyse de la requête. Il va au-delà. Il s'agit bien d'une sanction nouvelle qui n'est pas nécessairement demandée par les requérants, lesquels doivent demander l'annulation de l'élection.
Monsieur le Président : Je ne vous le fais pas dire ! Je suggère quant à moi de ne pas maintenir ce point, car sinon cela pourrait être pris comme une démonstration du gouvernement des Juges.
Madame LENOIR : Ou alors on peut mettre : le Conseil s'est interrogé...
Monsieur le Président : Non, je crois qu'il vaut mieux carrément le supprimer.
(Les conseillers entament un débat sur ce point, ils choisissent de ne pas maintenir le point 4).
Monsieur le Secrétaire général : En ce qui concerne le deuxième point, qui porte sur les actes préliminaires aux opérations électorales, la note qui vous est soumise s'inspire de la multiplication des appellations "écologistes". Il n'y a pas de juge qui à l'heure actuelle puisse faire cesser a priori une irrégularité même flagrante. Aussi le dernier paragraphe propose-t-il qu'une procédure d'urgence a priori puisse être mise en oeuvre. Le législateur pourrait s'inspirer de la loi du 4 janvier 1992 en matière de marchés publics. En revanche, la question du choix entre le juge administratif et le juge judiciaire est laissée très ouverte.
Monsieur le Président : Il vaut mieux mettre "pratique" plutôt
(Les conseillers s'accordent sur une modification du deuxième paragraphe).
Monsieur LATSCHA : Peut-être qu'ils vont lire ça comme la volonté du Conseil de s'immiscer dans les actes préparatoires.
Monsieur ABADIE : Non, il s'agit d'un simple constat !
Madame LENOIR : Ou alors mettons : "il faudrait créer une voie de droit spécifique...".
(Les conseillers entament un large débat sur la rédaction, Monsieur SCHRAMECK propose une rédaction pour les trois paragraphes, les conseillers s'accordent sur la suppression de la deuxième phrase du premier paragraphe, puis sur la rédaction de l'ensemble).
Monsieur LATSCHA : Faut-il revenir sur le financement ?
Monsieur le Président : Oui, oui, c'est indispensable.
Monsieur le Secrétaire général : Le point III rappelle que le Conseil a été conduit, dans des décisions marquées par une certaine automaticité, à prononcer des inéligibilités qui n'ont aucune portée pratique, surtout si les candidats n'ont pas obtenu 5 % des suffrages exprimés. L'enjeu pratique des 642 décisions est nul. Il n'y a aucune incidence sur le financement ni sur la situation personnelle des élus. Enfin, la procédure devant la Commission devrait permettre une régularisation.
Il reste que plusieurs autres améliorations pourraient être apportées. D'abord, la procédure devant le Conseil devrait permettre une véritable clôture de l'instruction. Vous avez été confrontés dans plusieurs cas à des mémoires tardifs. Ensuite, le problème des délais se pose puisque l'article L.O. 128 vous conduit à juger de tout le contentieux dans un délai de 9 mois après l'élection. Enfin, le champ de l'article L.O. 186-1 a été précisé, puisque vous avez vous-même dans votre décision portant sur la 2ème circonscription de l'Ardèche éliminé celles des requêtes qui n'étaient pas recevables. Mais il reste qu'il y a une différence, voulue par le législateur entre les élections législatives et les élections administratives. Ce dernier point, comme celui de la clôture de l'instruction ne sont pas repris dans la note. En effet, les dispositions sur l'instruction, comme celles qui vous conduiraient à élargir les possibilités d'audition qui ne sont actuellement prévues que pour des témoignages relèvent de modifications de votre règlement intérieur. Quant à la question de l'article L.O. 186-1 elle a été explicitement voulue par le législateur.
Monsieur le Président : Je trouve cela bien directif pour le législateur.
Madame LENOIR : Est-ce qu'il ne vaudrait pas carrément mieux confier le contentieux des comptes, ou leur examen préalable à la Cour des comptes ?
Monsieur le Président : Je me demande quant à moi s'il faut ainsi reprendre ces suggestions. Nous sommes confrontés à une réalité très sérieuse et à une source permanente de critiques. C'est vraiment désespérant que nous ayons eu tout cela à faire en si peu de temps. Mais je me demande s'il est bien opportun de mettre tout ça dans la note. Le système, c'est vrai, est incohérent ; quand je ne serai plus à ma place actuelle, je le dirai très fort et je ferai savoir ce que nous avons subi. Mais est-ce bien à nous d'insister sur tout cela ?
Monsieur FAURE : Il faut tout de même insister sur le fait que nous ne disposons que de très peu de temps.
Monsieur le Président : Il est sûr que la solution idéale serait de distinguer entre ceux des comptes qui sont liés à une éventuelle annulation et ceux qui ne sont pas susceptibles d'entraîner une autre élection.
Monsieur le Secrétaire général : Ont été écartées de la note des mesures qui auraient exigé une modification de la loi organique. Et page 6, la question de la représentation des parties à l'instance n'a pas non plus fait l'objet de développements. Je ne sais pas si le Conseil souhaite aborder cette question.
Monsieur le Président : Non. Nous verrons cela plus tard. Nous verrons aussi quel est l'accueil que le Gouvernement et le législateur feront à nos suggestions. Mais cela dépend essentiellement du règlement de procédure, c'est-à-dire de nous-mêmes.
Monsieur ABADIE : Il n'est pas tout à fait exact de dire que la décision d'inéligibilité est dépourvue d'effet.
Monsieur CAMBY : En tout état de cause elle est dépourvue de portée pratique.
Monsieur ABADIE : Quant au reste, il y a un problème d'égalité. Comment pourrions-nous ne pas prononcer dans tous les cas la même sanction. Si par exemple on statuait sur un compte après une élection partielle.
Madame LENOIR : Oui, la difficulté c'est en quelque sorte le point de départ du processus. La durée de l'inéligibilité peut toujours être d'un an. Mais il vaut mieux que l'on parte de la date à laquelle la décision est prise. C'est d'ailleurs le cas pour les élections relevant du juge administratif.
Monsieur ABADIE : Le terme est le même pour tous. Et c'est cela
Monsieur FAURE : Oui, s'il n'y a pas de décision intervenue, le député en cause peut se représenter et cela le législateur a voulu l'empêcher. D'où l'intérêt de la question des délais.
Monsieur RUDLOFF : Je souhaite que nous suivions la note dans l'ordre dans lequel elle se présente. On verra ce point un peu plus tard.
Monsieur le Président : Je crois que l'essentiel c'est que nous montrions qu'il est souhaitable que la pression qui s'est exercée sur le Conseil soit levée. Sur le plan formel je propose de rédiger un peu différemment le deuxième paragraphe en mettant : "parmi lesquels...".
(Les conseillers entament un large débat sur ce point).
Monsieur le Président : Et à la fin de la page 5 et dans le "haut" de la page 6, la rédaction me paraît également devoir être revue. On porte le chapeau des intérêts de la Commission des comptes de campagne. Elle n'a qu'à le faire elle-même.
Monsieur le Secrétaire général : Sur le troisième point, votre observation, Monsieur le Président s'applique tout à fait. Mais pour les deux autres, il y a un intérêt pour le Conseil constitutionnel à éviter une source d'un contentieux de masse.
Monsieur ABADIE : Sur le deuxième point, faut-il vraiment modifier la loi ? Ça ne me paraît pas être un élément essentiel à modifier.
Monsieur RUDLOFF : Ce qui est essentiel c'est la computation des délais.
Monsieur ABADIE : Mais c'est quasiment rien du tout : envoi ou réception, la différence est minime.
Madame LENOIR : Sur ce point notre jurisprudence est plus bienveillante que celle du Conseil d'Etat.
Monsieur le Président : Nous avons fait l'objet de critiques féroces et à l'intérieur même du monde judiciaire, notre prestige n'en est pas sorti gagnant. Le problème est simple, ou bien le délai est changé ou bien on court au grand galop pour tout juger dans les temps. Ce sera d'ailleurs un moyen de défense devant la Cour européenne des droits de l'homme : on a trop d'affaires en trop peu de temps. 648 dossiers à traiter en cinq ou six mois, cela n'est pas possible.
Madame LENOIR : Oh ! Nous n'avons pas eu à subir de si nombreuses conséquences.
Monsieur le Président : Dans le monde judiciaire, on a considéré que nous avions une bien curieuse façon de juger. J'ai entendu beaucoup de choses là-dessus. Il existe des règles fondamentales de procédure que nous n'avons pas respectées. Passez-moi l'expression : on a cassé des cailloux pendant des semaines et le résultat c'est que tout le monde insiste sur les défauts et les vices de la procédure.
Madame LENOIR : Il ne faut pas non plus tendre des verges pour se faire battre.
Monsieur le Président : Que voulez-vous dire ? Je pose la question. Est-ce que le Conseil veut ou non relever la très forte pression qu'il a eu à subir ?
Messieurs FAURE, RUDLOFF, CABANNES, ABADIE : Oui, absolument !
Monsieur le Président : Alors dans ce cas-là il faut bien que nous allions jusqu'à proposer des remèdes ou, du moins, à ouvrir des pistes.
Monsieur ABADIE : Et si nous faisions partir le délai, non du tour de l'élection mais du moment du dépôt du compte. Nous disposerions ainsi de deux mois de plus. Cela serait bien.
Monsieur FAURE : Non, cela revient à tenir la main du législateur, je ne suis pas d'accord.
Monsieur le Président : Alors, il faut dire que le délai doit partir du moment où le juge statue.
Monsieur ABADIE : Je maintiens que c'est une inégalité.
Monsieur le Président : Mais non, c'est le même cas pour les élections municipales, vous prenez l'affaire quand vous voulez !
Monsieur le Secrétaire général : Même si vous allongez la période, il reste que vous n'avez pas résolu la question des inéligibilités "sans effet".
Monsieur le Président : Ce n'est jamais sans effet. Une inéligibilité dans la circonscription ça fait toujours mauvais effet.
Monsieur FABRE : On ne doit pas trop entrer dans les détails.
Monsieur le Président : Non, l'essentiel c'est qu'on indique que le délai pour statuer est beaucoup trop court. De fait, la date limite était le 28 décembre.
Monsieur CABANNES : Vous vous rendez compte. Alors que la Commission peut ne nous saisir que huit mois après l'élection, ça laisse très peu de temps pour statuer.
Monsieur FAURE : Dans ce cas-là il reste un mois utile, c'est ce qui a failli se produire avec Madame AILLAUD.
(Monsieur le Président relit le dernier paragraphe de la page 6. Il propose plusieurs modifications de forme.
Les conseillers s'accordent sur une rédaction.)
Monsieur ABADIE : J'ai refait les calendriers : pendant trois mois et demi, on ne peut rien faire, et cela laisse les candidats en situation d'illégalité. Supposons que nous ayons des partielles en septembre et que nos décisions interviennent l'une le 1er septembre et l'autre le 28 décembre. On aurait jugé pour l'un et pas pour l'autre.
Monsieur le Président : Mais l'inégalité vous l'auriez eu tout de même. En cas de dissolution par exemple, si le Conseil n'a pas fini son travail, tous les candidats sont dans la même situation.
Monsieur FAURE : Cette situation peut arriver en droit s'il survient une dissolution avant que le contentieux n'ait été totalement jugé.
Monsieur le Président : Oui, s'il y a une dissolution au milieu du contentieux.
Monsieur ABADIE : Oui, c'est vrai.
Monsieur LATSCHA : Et puis, il y a un autre argument. Pourquoi ne pas se fonder sur le fait que le délai n'est pas le même pour nous et pour le juge administratif ?
Monsieur le Président : Oui, oui, on peut le faire, c'est à la fin de la page 6.
Monsieur ABADIE : J'aurais préféré que l'on décale simplement de deux mois.
Monsieur le Président : Non, ce ne serait pas suffisant. Refaites le calcul, ça vous aurait laissé jusqu'en février pour des saisines qui peuvent intervenir jusqu'à la fin du mois de novembre. Ce n'est pas suffisant. Je tiens beaucoup, en outre, à ce que cela soit dit avant que des procédures soient introduites devant la Cour européenne des droits de l'homme.
Monsieur FAURE : On pourrait se contenter de dire que le délai est très court, sans demander pour autant l'alignement sur le juge administratif.
Monsieur le Président : Non, je ne suis pas d'accord, c'est un excellent argument. Il ne faut pas s'en passer.
Monsieur LATSCHA : On a rendu en tout 801 décisions. Je partage votre point de vue, Monsieur le Président.
Monsieur le Secrétaire général : Bien, j'essaie de reprendre la rédaction en tenant compte des observations du Conseil.
Monsieur le Président : On peut faire sauter ce qui est lié au délai d'envoi des comptes.
Monsieur CAMBY : Qu'il me soit permis de trouver cela dommage car vous auriez eu 450 décisions de moins à rendre.
Monsieur le Secrétaire général : Cela n'est pas certain. La Commission des comptes de campagne aurait pu apprécier différemment et nous en envoyer tout de même une partie. Et puis il est vrai qu'il ne s'agit que d'un problème mineur.
Madame LENOIR : La règle en matière juridictionnelle c'est la réception du dossier. Et on ne tient compte de l'envoi que pour apprécier d'éventuels délais anormaux. Je ne vois pas pourquoi on changerait.
Monsieur le Président : Cela relève vraiment du législateur. Je ne sens pas cette affaire à cette place : cela ne relève pas vraiment de notre mission.
(Les conseillers s'accordent alors sur la proposition finale, sur la proposition de rédaction de Monsieur le Secrétaire général.
Monsieur le Président : Ceci ne soulèvera pas les passions. Je ferai une lettre d'envoi au Président de la République et au Premier ministre.
Monsieur CABANNES : On envoie aux deux ?
Monsieur le Président : Oui ! Il appartiendra aux services de Matignon d'en assurer la diffusion, si elle leur apparaît souhaitable.
(Le vote est acquis à l'unanimité). La séance est levée à 19 h 10.
Les instructions de transcription ont été communiquées aux étudiantes et aux étudiants.