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Julie Vaernewyck


ORDRE DU JOUR DE LA SEANCE DU

vendredi 29 décembre 1995

[1] Loi ordinaire

Loi de finances rectificative pour 1995 (n° 95-371 DC)


COMPTE-RENDU DE LA SEANCE DU 29 DECEMBRE 1995 (17 heures)

Monsieur le Président : Je vous informe, mes Chers collègues, que Monsieur RUDLOFF se sent un peu mieux. Nous nous en félicitons tous.

Reprenons nos travaux.

Je donne la parole à Monsieur le Préfet ABADIE sur la loi de finances rectificative pour 1995.

Monsieur ABADIE donne lecture de son rapport.

Outre la loi de finances pour 1996, le Conseil a été également saisi de la loi de finances rectificative pour 1995.

Quelques mots, tout d’abord, sur le contexte économique qui donne à ce collectif budgétaire sa physionomie particulière :

L’élément marquant est l’importante baisse des rentrées fiscales attendues : 24,1 milliards de francs par rapport aux prévisions associées au collectif de printemps. (Loi du 4 août 1995). Cette baisse est due au fort ralentissement de la croissance qu’a connu l’économie française pendant les trois premiers trimestres de l’année, les principaux impôts (TVA, impôts sur les sociétés mais aussi TIPP) étant, comme on le sait, extrêmement sensibles à la conjoncture.

Et encore convient-il de souligner que le présent collectif a été élaboré à partir des données conjoncturelles disponibles à la fin de l’été. Il est à craindre que la chute de la consommation des ménages enregistrée au mois d’octobre, et qui s’est amplifiée avec la crise sociale récente, ne rende ces évaluations à la baisse largement obsolètes.

Confronté à cette chute des recettes fiscales que le rapporteur du Sénat, Monsieur AUBERGER, a qualifié en séance de "considérable et inhabituelle", le gouvernement n’a pas voulu voir se creuser le déficit budgétaire celui-ci n’est en effet qu’en très légère progression par rapport au déficit arrêté lors du collectif de printemps, et s’élève à 321,85 milliards de francs.

Ce ratio déficit public/P.I.B. reste donc en-dessous de 5 % et ce afin de satisfaire progressivement aux exigences de l’article 104 C du Traité sur l’Union. L’objectif gouvernemental en la matière, est une baisse d’un point par année : 5 % en 1995, 4 %  en 1996 et 3 % en 1997, 3 % étant l’objectif fixé par le traité, (cf. protocole annexé au TUE relatif aux déficits excessifs).

Deux mouvements concourent à cette stabilisation du déficit budgétaire

1° Les moindres rentrées fiscales ont été compensées par le recours à des ressources non fiscales : il s’agit pour l’essentiel de prélèvements effectués sur les fonds gérés par la caisse des dépôts et consignations. Ce sont ces prélèvements dont la constitutionnalité est aujourd’hui contestée.

2° Des ouvertures de crédit modérées ont par ailleurs été compensées par des annulations de crédit d’un montant exceptionnellement élevé (20,6 milliards de francs) : des économies forfaitaires ont été réparties entre les différents départements ministériels et certains d’entre eux ont fait l’objet de véritables "coupes sombres" (défense, agriculture et culture), d’autres au contraire restant relativement épargnés (éducation nationale, justice, intérieur).

Une très faible augmentation du déficit budgétaire (+ 0,26 milliards de francs) mais des mouvements de grande ampleur des masses de recettes et de dépenses, voilà ce qui caractérise ce deuxième collectif.

La saisine concentre ses critiques sur deux articles : les articles 3 et 5 de la loi.

I. L’article 3 est le pivot du collectif, puisqu’à lui seul il procure 15 milliards de recettes à l’Etat, prélevés sur les fonds d’épargne gérés par la caisse des dépôts et consignations.

On connaît la bonne situation de liquidité de ces fonds alimentés par les sommes déposées sur les livrets réglementés (livrets A - Codévi - comptes d’épargne populaire...).

Ce n’est pas la première fois que cette trésorerie opulente (183 milliards de francs au 1er janvier 1995) est utilisée pour "boucler" le budget.

Dans la loi de finances initiale, ce sont 23,3 milliards de francs que l’Etat avait déjà prélevés sur ces fonds au titre de la garantie qu’il apporte aux livrets réglementés.

Le prélèvement supplémentaire de 15 milliards qui figure dans le collectif est présenté, quant à lui, dans l’exposé des motifs de la loi, comme la "récupération des sommes versées par l’Etat à la caisse de garantie du logement social".

Je m’explique :

De 1966 à 1986, les organismes d’H.L.M. ont emprunté, pour financer le logement social, à la caisse de prêt aux organismes d’H.L.M. (C.P.H.L.M.), devenue, en 1986, Caisse de garantie du logement social (C.G.L.S.).


Pendant toute cette période, la Caisse de prêt a perçu des subventions accordées par l’Etat et destinées en principe à bonifier les prêts.

A partir de 1986, la C.G.L.S. a cessé de consentir des prêts, les organismes d’H.L.M. se finançant directement auprès de la caisse des dépôts.

Mais la caisse de prêt a conservé la gestion des encours des prêts consentis avant 1986, et à recevoir des subventions de l’Etat. Ces subventions étaient en fait destinées pour l’essentiel à combler son déficit de trésorerie. En effet, la caisse s’étant refinancée sur une durée plus courte qu’elle n’avait prêté, les remboursements qu’elle percevait des organismes d’H.L.M. ne suffisaient pas à combler ses charges financières. L’ensemble des subventions ainsi versées par le budget général à le C.P.H.L.M., puis à la C.G.L.S., de 1967 à 1994 atteignent un montant cumulé de 46 milliards de francs.

Ce sont ces subventions ou du moins leur "trop perçu" que l’Etat a décidé de recouvrer aujourd’hui. Cette "reprise" n’est en elle-même pas vraiment contestable dans son principe puisque ces sommes ont davantage servi à combler des déficits de trésorerie qu’à bonifier les prêts au logement social.

Mais l’Etat aurait normalement dû, pour ce faire, attendre l’année 2003, date à laquelle la trésorerie de la C.G.L.S. serait devenue positive.

Seule la caisse des dépôts pouvait dès aujourd’hui supporter un tel prélèvement, ce qui explique le "montage financier" qui figure à l’article 3. Ce montage consiste à transférer le portefeuille des prêts consentis jusqu’en 1986 à la caisse des dépôts pour ensuite pouvoir prélever sur cette dernière la valeur actualisée des subventions.

Le I opère le transfert de portefeuille entre la C.G.L.S. et la caisse des dépôts : à partir du 1er janvier 1996, cette dernière gérera les prêts consentis aux organismes d’H.L.M. jusqu’au 31 décembre 1985 et sera substituée à la caisse de garantie dans tous les droits et obligations relatifs à ces prêts.

Le transfert s’accompagne - c’est l’objet du II - d’un versement à l’Etat, par la caisse des dépôts, d’un montant de 15 milliards de francs.

Le montage est ingénieux, il faut en convenir. Outre, le fait qu’il permet de combler le besoin impérieux de financement du budget général, il a été présenté par le gouvernement comme de nature à améliorer la cohérence et la transparence du dispositif de financement du logement social.

Par ailleurs, le prélèvement que l’Etat se propose d’opérer sur la caisse des dépôts s’analyse, en termes de finances publiques, comme l’opération symétrique des subventions accordées, lesquelles sont des opérations définitives. Il s’agit donc d’un prélèvement obligatoire qui réduit d’autant le déficit public au sens du traité de Maastricht.


Cette opération a néanmoins focalisé les critiques de l’opposition au cours de la discussion, la représentante du groupe communiste à l’Assemblée n’hésitant pas à la qualifier de "racket" sur les fonds destinés au logement social.

Les auteurs de la saisine, quant à eux, formulent à son encontre trois séries de griefs :

1° Ils exposent en premier lieu que ce montage a pour effet d’ "atténuer la lisibilité de l’opération" et de "masquer le coup porté au réseau de financement du logement social", portant ainsi atteinte au principe de sincérité budgétaire.

2° Ils font valoir en second lieu - par un raisonnement quelque peu antinomique du premier - que le transfert de portefeuille opéré au II est étranger à l’objet des lois de finances et doit donc être censuré comme "cavalier budgétaire" Dans la mesure où le II se réfère au I, sa censure s’imposerait par voie de conséquence. Enfin, et dès lors que le prélèvement opéré par l’article 3 constitue le pivot de la loi de finances rectificative, sa censure porterait atteinte à l’équilibre même du collectif. Nous devrions donc censurer également l’article 7, qui est l’article d’équilibre.

3° Enfin - et ce grief est surtout développé dans le mémoire en réplique du gouvernement - ce dispositif porterait atteinte à l’objectif de valeur constitutionnelle tendant à ce que toute personne dispose d’un logement décent, reconnu par notre décision n° 94-359 DC du 19 janvier 1995.

En réponse à cette argumentation nourrie, je vous propose tout d’abord d’affirmer que le I et le II de l’article 3 constituent les éléments indivisibles d’un dispositif d’ensemble visant à satisfaire un besoin impérieux de financement de l’Etat. La caisse de garantie du logement social ne disposant pas de la trésorerie nécessaire pour verser à l’Etat les 15 milliards de francs dont il avait besoin, cette opération n’a été rendue possible que par le transfert de portefeuille opéré par le I. Le Conseil a fait un raisonnement analogue dans une décision n° 85-201 DC du 28 décembre 1985. Nous ne sommes donc pas en présence d’un cavalier budgétaire. Et cette présentation de la loi de finances rectificative, qui ne pouvait être évitée, ne méconnaît pas le principe de sincérité budgétaire.

Le grief tiré de la violation de l’objectif de valeur constitutionnelle que constitue le droit au logement n’est, quant à lui, pas très sérieux : rien dans l’instruction ne permet d’affirmer que le prélèvement contesté sur des fonds de la caisse de dépôts et consignations largement excédentaires nuira en quoi que ce soit au financement du logement social.

Si, comme je vous le propose, nous admettons la constitutionnalité de ce prélèvement d’importance, nous refuserons également de censurer l’article d’équilibre de la loi.

II. Reste le III de l’article 3 que je n’ai pas encore évoqué. Cette disposition crée auprès de la caisse nationale d’épargne un fonds de garantie doté d’une réserve correspondant à 2 %  de l’encours annuel des fonds déposés à la Poste sur les livrets "A", et versés à la caisse des dépôts.

Les auteurs de la saisine y voient un "cavalier budgétaire", ce que nous n’aurons pas grand mal à admettre.

Cette disposition trouve son origine dans un amendement proposé par le gouvernement au cours de la discussion du projet de loi devant le Sénat. Désireux de couper court à une controverse sur la valeur actualisée des subventions dont l’Etat attendait le retour, le ministre a débloqué le débat en faisant diversion et en proposant la création de ce fonds qu’il a présenté comme une revendication ancienne de la caisse des dépôts et une mesure salutaire pour garantir les dépôts des petits épargnants.

L’amendement a été adopté à l’unanimité... et ce alors qu’un tel fonds existe déjà, puisqu’il est prévu par l’article 34 du code des Caisses d’Epargne et réglementé par deux décrets en Conseil d’Etat...

Inutile d’ajouter que, dans ces conditions, le Gouvernement s’est abstenu de défendre sur ce grief, trop heureux sans doute que nous censurions cet article malencontreux. Je vous propose donc sans état d’âme de le regarder comme étranger à l’objet des lois de finances.

III. J’en viens maintenant à l’article 5 qui nous retiendra moins longtemps, son économie générale étant plus simple. Cette disposition prévoit un "prélèvement exceptionnel" de 680 millions de francs sur les fonds déposés auprès de la Caisse des dépôts par l’ORGANIC (Organisation autonome nationale de l’industrie et du commerce) et constitués par le produit de la taxe dite "taxe sur les grandes surfaces".

Cette taxe, prévue par le deuxième alinéa de l’article 3 de la loi du 13 juillet 1972, dite "loi Royer", a pour objet :

- principalement de financer l’indemnité de départ versée aux commerçants et artisans ,

- subsidiairement, d’alimenter le F.I.S.A.C. qui est un fonds destiné à financer des opérations de sauvegarde du petit commerce.

1° Le premier grief formé à l’encontre de cette disposition est tiré d’un détournement de procédure. Le Gouvernement se serait livré à des "manipulations soigneusement planifiées", organisant à dessein l’excédent qui a permis d’opérer le prélèvement contesté.

Alors que la loi de finances pour 1995 a élargi le champ d’application de la taxe, augmentant par là même son rendement, on aurait "tout fait" pour que le F.I.S.A.C ne se  réunisse pas, ce qui serait à l’origine d’une "contraction spectaculaire et artificielle de ses dépenses"...

Le Gouvernement, en défense, soutient qu’il n’en est rien et que les dotations affectées au F.I.S.A.C. ont constamment augmenté d’année en année. Si le fonds a cessé de se réunir pendant six mois en 1995, ce serait en attente de la parution d’un décret modifiant les modalités de son fonctionnement...

Face à cette défense quelque peu embarrassée, je vous propose de rejeter ce grief en disant que les conditions dans lesquelles a fonctionné le F.I.S.A.C. sont inopérantes quant à la constitutionnalité de la disposition contestée.

2° Le second grief articulé à l’encontre de l’article 5 est tiré de la rupture du principe d’égalité devant l’impôt. Les auteurs de la saisine nous exposent que le prélèvement opéré par l’Etat s’analyse comme une "désaffectation" au profit du budget général d’une part considérable de la taxe acquittée par les grandes surfaces. L’effort ainsi demandé à ces contribuables ne serait plus en rapport avec l’objectif poursuivi par la loi qui était d’organiser une solidarité entre les différentes formes de commerce.

Il nous suffira, me semble-t-il, pour répondre à ce grief, de dire que la circonstance que cette imposition ait été financée par le produit d’une taxe mise à la charge d’une catégorie particulière de contribuables n’est pas de nature à méconnaître le principe d’égalité.

3° Enfin cette recette du budget général concourt aux conditions de l’équilibre budgétaire et satisfait, par là-même, au principe de nécessité de l’impôt c’est la réponse que je vous propose d’apporter au troisième grief formulé à l’encontre de l’article 5.

Monsieur le Président : J’ouvre la discussion sur l’article 3. Madame LENOIR, vous avez la parole.

Madame LENOIR : Je ne vois pas comment on peut accepter ce qui nous est présenté.

Dans un certain nombre de domaines où on constate des déficits croissants (comptes sociaux, S.N.C.F.) on procède à des débudgétisations puis à des budgétisations successives.

On verra demain comment la question se pose pour le remboursement de la dette sociale. Tout ceci se fait à la barbe du contribuable. Cette caisse de garantie a prêté. L’Etat l’a subventionnée. Et comme on ne peut pas lui reprendre ce qu’elle a perçu, c’est la Caisse des dépôts qui est ponctionnée ! A force de valider ce type d’opérations depuis des années, on se heurte à de graves problèmes de dettes publiques.

Et puis, on ne peut pas dire que l’Etat reprend "un excédent de subventions" !

Je veux bien qu’on trouve un moyen de valider cette opération. Mais je ne veux pas qu’on admette que l’Etat puisse reprendre une subvention versée.


La direction du Budget a admis ce matin devant nous qu’à force de multiplier ces opérations de passe-passe on se trouve confronté à de graves difficultés. Il y a toujours les meilleurs intentions : combler des déficits, satisfaire nos engagements internationaux... On a ainsi ouvert des boulevards à des débudgétisations multiples.

Monsieur le Président : Madame, vous contestez plus la rédaction que le fond de la décision !

Monsieur ABADIE : On reprendra la rédaction. Sur le plan du raisonnement juridique de Madame LENOIR ce sont les déficits qui nous obligent aux débudgétisations. Ici, c’est plutôt le contraire de ce que vous décrivez. Il s’agit d’un prélèvement sur les comptes d’un établissement public : la Caisse des dépôts. Or c’est la loi qui définit les obligations de cet établissement, ses dépenses et ses recettes. Rien dans la Constitution n’interdit une telle opération. D’ailleurs, les saisissants ne contestent pas la constitutionnalité de cette opération.

L’intention ici est très claire. Elle résulte des statuts de la Caisse de garantie. Celle-ci a été, pendant une période, en déficit. L’Etat était autorisé à combler ce déficit - il était même dans l’obligation de le faire - et à récupérer ultérieurement le montant de ses "subventions". Cela serait devenu possible en 2003, quand des excédents seraient apparus.

Il le fait aujourd’hui, par anticipation. C’est tout. Je ne vois rien d’inconstitutionnel dans tout cela. Madame LENOIR a raison de dénoncer les débudgétisations abusives. Mais ici on ne débudgétisera pas, on rebudgétisera.

La Constitution ne dit pas comment s’organise la comptabilité publique de l’Etat. C’est du niveau de la loi...

Madame LENOIR : Quel est l’excédent de la Caisse de garantie ?

Monsieur ABADIE : Mais elle est en déficit ! Je vous l’ai expliqué ! Elle n’aurait été en excédent qu’en l’an 2003. C’est ce qui explique que ce prélèvement soit fait sur la caisse des dépôts et consignations !

Madame LENOIR : Et cela se reproduira !

Monsieur le Président : A chaque jour, suffit sa peine !

Monsieur DAILLY : En tout cas, saluons l’ingéniosité du procédé !

Monsieur le Président : Lisez donc le projet, Monsieur le rapporteur.

Monsieur ABADIE donne lecture du 1er paragraphe du projet de décision relatif aux I et II de l’article 3.


Monsieur le Président : C’est le terme "subventions" qui gêne certains.

Monsieur AMELLER : C’est la loi elle-même qui l’emploie !

Monsieur le Secrétaire général : Alors, je vous suggère de mettre le passage entre guillemets.

Monsieur le Président : Entendu. On reprend les termes de la loi et on les met entre guillemets. Qui vote pour ?

Tous les membres votent pour, à l’exception de Madame LENOIR.

Monsieur ABADIE donne lecture de la suite du projet sur les I et II de l’article 3.

Monsieur DAILLY : Pourquoi les guillemets à "atténuer la lisibilité de l’opération" ?

Monsieur ABADIE : Ce sont les termes utilisés par les saisissants. Nous nous contentons de les reprendre sans les faire nôtres.

Monsieur DAILLY : Je suis satisfait de la réponse. D’accord. Ensuite, je lis : "l’objectif de valeur constitutionnelle tendant à permettre à toute personne de disposer d’un logement décent". Cela me laisse pantois !

Madame LENOIR : C’est notre décision du 19 janvier 1995 !

Monsieur ROBERT : "L’objectif tendant" ? Quelle est la formulation exacte ?

Monsieur le Secrétaire général : Je vous propose de surseoir à la discussion sur ce point de rédaction. On va relire la décision du 19 janvier 1995.

Monsieur AMELLER : L’article 7 n’apparaît pas en titre, page 4.

Monsieur le Président : C’est vrai. On l’ajoute.

Monsieur le Secrétaire général : Je réponds au Professeur ROBERT sur le droit au logement. Le paragraphe utile est le suivant : "Considérant qu’il résulte de ces principes que la possibilité pour toute personne de disposer d’un logement décent est un objectif de valeur constitutionnelle". Quant à l’argumentation des requérants elle est la suivante : elle invoque "l’objectif de valeur constitutionnelle relatif à la possibilité pour toute personne de disposer d’un logement décent"

Monsieur ROBERT : On reprend la même chose dans le projet.

Monsieur le Président : D’accord. Qui est pour ?

(Tout les membres approuvent)


Monsieur le Président : Monsieur ABADIE, lisez la suite du projet relatif à l’article 3-III, c’est-à-dire la création d’un fonds de réserve de la Caisse nationale d’épargne.

Monsieur ABADIE en donne lecture.

Monsieur le Président : Bien.

Monsieur DAILLY : Quelles sont les conséquences pratiques de notre décision ?

Monsieur le Président : Aucune. La Caisse existe déjà ! Et ça fera plaisir au Gouvernement et à l’opposition.

Monsieur DAILLY : Mais cela ne ressort pas du texte !

Monsieur le Président : Qui est pour ?

(Unanimité)

Monsieur le Président : Monsieur le rapporteur, prenez l’article 5.

Monsieur ABADIE : Puisqu’on est pressé, que vous m’avez donné 1 h 30, Monsieur le Président, je lis directement le projet sur l’article 5 (il en donne lecture).

Monsieur DAILLY : Je m’interroge sur le passage "Considérant que les conditions dans lesquelles a été constitué l’excédent..." C’est un peu alambiqué ! Est-ce bien nécessaire ?

Monsieur ABADIE : Il faut tout reprendre ! C’est même le grief le plus important.

Monsieur AMELLER : On peut dire : "Sur" et non "Quant à".

Monsieur le Président : D’accord.

Madame LENOIR : Le "en tout état de cause" est-il nécessaire ?

Monsieur le Secrétaire général : Oui. Il y a tout un débat sur lequel on ne se prononce pas.

Madame LENOIR : Je propose : "qu’il critique également l’article 5 au regard...".

Monsieur le Président : Ça rappelle la taxe RAMADIER !

Monsieur ABADIE : Elle était affectée, elle !

Monsieur le Président : Et il n’y avait pas de Conseil constitutionnel !

Madame LENOIR : Je reviens à la page 2 : je propose "un excédent de subventions".


Monsieur le Président : Vous voulez revenir sur ce qui a été décidé ! Ce n’est pas possible. Je consulte maintenant le Conseil sur le "considérant balai".

Bon, on est d’accord.

Monsieur ABADIE : Je voudrais, pour finir, dire deux mots sur l’article 13 et l’article 2 qui ont été "épinglés" par le Conseil d’Etat dans son avis. Mais je ne propose aucune censure.

(Il donne lecture de la suite de son rapport)

IV. Les premières remarques, très brèves, sont relatives à l’article 13 qui a pour objet d’exonérer de l’impôt de bourse les opérations réalisées sur le Nouveau marché.

Le Nouveau marché boursier, qui sera ouvert au début de l’année 1996, est destiné à aider les jeunes sociétés dotées d’un fort potentiel de croissance mais qui, parce qu’elles effectuent des opérations dites "à risque", ont des difficultés à se procurer des fonds propres.

Le projet de loi initial n’avait pas voulu citer expressément dans la loi le Nouveau marché, à la fois parce que sa création était à l’époque encore incertaine et parce qu’il devait être géré par une simple société commerciale. Il avait donc choisi d’exonérer toutes les opérations réalisées, sur quelque marché que ce soit, dès lors que le chiffre d’affaires de la société émettrice n’excédait pas 500 millions de francs et subordonné l’entrée en vigueur de cette exonération à la transposition d’une directive du Conseil concernant les services d’investissement dans le domaine des valeurs mobilières.

Le rapporteur général devant le Sénat avait souligné le risque d’inconstitutionnalité de cette disposition, dès lors que l’exonération pouvait s’appliquer à la côte officielle, et que certaines sociétés auraient été exonérées et d’autres pas.

Le Conseil d’Etat, quant à lui, s’est montré réservé dans son avis sur le fait que la disposition faisait référence à une directive non encore transposée en droit interne.

Aussi l’article a-t-il été entièrement réécrit par la Commission mixte paritaire. Il exonère désormais clairement les opérations réalisées sur le nouveau marché, toute notion de seuil et toute référence à la directive ayant désormais disparu. Une telle exonération - dont bénéficie déjà le second marché - introduit certes une différence de traitement ; mais cette différence est en rapport avec l’objet du texte encourager les jeunes sociétés innovantes. Il n’y a donc pas rupture des principe d’égalité.

V. Le second article "épinglé" par le Conseil d’Etat dans son avis concerne l’article 2 de la loi qui transpose une directive du Conseil relative au régime des produits soumis à accise.


Le Conseil d’Etat précise dans son avis que les obligations prévues par ce texte, et qui rétroagissent à compter du 1er janvier 1993, "ne pourraient donner lieu qu’au seul paiement des droits exigibles, à l’exclusion des pénalités". Il exclut également "tout intérêts de retard afférents aux droits exigibles pour le passé dès lors que ces droits, n’étant pas dûs à l’époque, ne pouvaient pas ouvrir droit au profit de l’Etat à de tels intérêts".

Une telle observation, si nous la faisions nôtre, devrait nous conduire non pas à censurer l’article 2 - la rétroactivité d’une mesure fiscale n’étant pas par elle-même contraire à la Constitution - mais à l’assortir d’une réserve d’interprétation. Mais la saisine n’ayant pas soulevé cette objection, je ne vous propose pas une telle réserve, l’habitude du Conseil étant de ne pas formuler de réserves sur des dispositions qui n’ont pas été expressément contestées dans la saisine.

Je me proposais néanmoins de vous dire quelques mots sur le problème de principe qui est en cause, dans la mesure où le Conseil sera sans aucun doute conduit à le trancher un jour ou l’autre. Mais je n’en ai pas le temps. Sachez cependant que la question que nous aurons peut-être à trancher un jour est celle de la nature juridique des intérêts de retard. Si vous admettez qu’ils ont un caractère répressif, et bien leur application rétroactive serait illégale au regard de l’article 8.

Monsieur le Président : Bon. Qui est pour l’adoption du projet ?

(Tous les membres votent pour, sauf Madame LENOIR)

La séance est levée à 18 h 45.

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